Intervention de Delphine Batho

Séance en hémicycle du 21 janvier 2016 à 9h30
République numérique — Article 18

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Batho :

Je remercie la secrétaire d’État pour son propos, qui confirme complètement mon inquiétude. Ce que je craignais, en effet, c’est que, derrière ce petit amendement du rapporteur adopté en commission des lois, se cache un débat que nous avons de façon récurrente avec un certain nombre de chercheurs de l’INED sur le fait qu’en France, parce que nous avons une certaine conception de la citoyenneté et de la nationalité, nous n’autorisons pas – et je m’en tiens à ce seul débat – les statistiques ethniques, c’est-à-dire les statistiques fondées sur l’origine des citoyens français ou sur l’origine de leurs ascendants.

Je pense que c’est une question grave et qu’on ne peut la trancher au détour de l’article 18 du projet de loi sur le numérique. Ce serait tout à fait inadapté au regard des dispositions de l’article 8 de la loi informatique et libertés.

Pour avoir réalisé deux rapports sur les fichiers de police et de gendarmerie, je connais cette loi par coeur. Le principe de l’interdiction de la collecte et du traitement des données sensibles, les dérogations très limitées dont il fait l’objet et les circonstances dans lesquelles ces dérogations peuvent intervenir, je les connais par coeur, et je connais aussi les garanties qu’il faut apporter dans ce cadre.

Je considère donc que la protection des données sensibles, notamment celles qui sont relatives à l’origine raciale et ethnique de la population, ne relève pas du rôle de décision au cas par cas de la CNIL : c’est le rôle du législateur quand il s’agit de savoir si l’on autorise des travaux de recherche historique ou scientifique sur une telle question. C’est pourquoi, très solennellement, je maintiens mon amendement et invite chacun de mes collègues à prendre ses responsabilités.

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