Intervention de Charles de Courson

Réunion du 20 janvier 2016 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Êtes-vous sûrs que les indicateurs statistiques français mesurent bien la réalité sociale ? Le concept de NEET – Not in Employment, Education or Training, c'est-à-dire les jeunes qui ne se trouvent ni en formation, ni en études, ni en emploi – me paraît le plus intéressant. Or les chiffres sont là en hausse depuis 2008, et vous nous dites que la légère baisse observée à partir de 2012 est peut-être simplement liée à un changement de méthode statistique. Quant aux ESL – Early School Leavers, c'est-à-dire sortants précoces –, êtes-vous sûrs que le critère du diplôme soit bien adapté à la mesure de ce phénomène ?

S'agissant des remèdes au décrochage, le vrai problème se situe, me semble-t-il, très en amont. Une grande partie de ces décrocheurs sont connus dès l'enseignement primaire : à la fin du CM2, une proportion d'environ 20 % des élèves – proportion en hausse lente, mais continue au cours des vingt à vingt-cinq dernières années – ne savent pas correctement lire, écrire et compter. Les enseignants que je rencontre me disent qu'ils repèrent ces enfants dès le CP ; les raisons de cette situation sont d'ailleurs nombreuses. Vous n'abordez pas cette question, mais ne faudrait-il pas intervenir dès l'école primaire ? Ne serait-ce pas beaucoup plus efficace et beaucoup moins coûteux ? Permettez-moi de penser, mes chers collègues, que la question de la réforme du collège est tout à fait subsidiaire par rapport à cette question de fond de l'enseignement primaire.

Pour ce qui est du problème institutionnel, je me sens assez proche de la réflexion de notre collègue Wauquiez, sans y mettre autant de vigueur, étant moi-même issu de la Cour des comptes. Je rappelle que ce n'est pas la Cour qui dirige ce pays, mais l'exécutif, de temps en temps sous l'influence du législatif.

Il n'est pas à mon sens possible de mener en la matière une politique nationale. Pourquoi ne pas confier cette compétence aux régions ? Cela ne voudrait pas dire que l'État s'en désintéresserait ; il pourrait signer des accords avec les régions, afin de mettre en place des politiques adaptées à chacune. Il reviendrait aux régions de mener des politiques par bassin d'emploi, car les situations peuvent différer du tout au tout. Mais vous n'osez pas faire cette proposition : vous vous montrez au fond très conservateurs. Vous vous contentez de demander des plans pluriannuels.

C'est là la dérive de la gouvernance à la française : on ne restructure jamais. Il faudrait pourtant désigner un pilote dans l'avion, un patron, responsable, à qui on donne les moyens d'agir – l'État surveillant bien sûr la mise en oeuvre de ces politiques.

Enfin, s'agissant de l'évaluation, je regrette que vous ne portiez pas d'appréciation sur le rapport entre le coût et l'efficacité, au regard de la difficulté des différents publics, qui n'est pas du tout la même pour chacune des cibles de ces vingt-deux dispositifs.

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