Intervention de Ernestine Ronai

Réunion du 12 janvier 2016 à 17h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Ernestine Ronai, coordinatrice nationale de la lutte contre les violences faites aux femmes au sein de la MIPROF, coprésidente de la commission « Violences de genre » du HCEfh, et responsable de l'Observatoire des violences de Seine-Saint-Denis :

La loi prévoit que le procureur demande de manière systématique à la femme si elle souhaite demeurer dans son logement – c'est la procédure d'éviction – et peut également préciser les modalités de prise en charge des frais afférents au logement. Le fait que cette mesure, d'ordre civil, relève du procureur, dont le rôle est, par définition, pénal, explique qu'elle soit si peu appliquée ; il faudrait pourtant qu'elle le soit, car le départ du conjoint risque d'entraîner une baisse dramatique de revenu de la mère. Les magistrats doivent se pénétrer de cette logique de protection et mieux articuler, dans cette perspective, droit civil et droit pénal.

La loi du 4 août 2014 prévoit qu'il peut être recouru à la procédure de médiation à la demande de la dame, mais le texte est encore trop souvent compris dans le sens de la rédaction de 2010, qui mentionne simplement l'« accord » de cette dernière, ce qui vaut à la médiation de perdurer dans bien des départements alors qu'elle a disparu dans d'autres. Dans ce contexte, la protection de l'enfance demeure un sujet à part entière ; nous avons fait sortir la médiation par la porte, elle reviendra par la fenêtre avec la médiation familiale. Pas plus que la médiation pénale, la médiation familiale n'est adaptée aux cas de violences, à la différence des situations ordinaires de conflit. Qu'elle soit considérée sous l'angle civil ou l'angle pénal, la violence ne met pas les deux interlocuteurs sur un pied d'égalité, car il y a un dominant et un dominé : la médiation ne peut pas fonctionner dans ces conditions, et je me permets d'appeler l'attention du législateur sur ce point.

Vous avez décidé que le magistrat devait se prononcer sur le retrait total ou partiel de l'autorité parentale lorsque « monsieur » était condamné pour un délit ou un crime. L'application de cette mesure demeure imparfaite : même dans le pire des cas, lorsque « monsieur » a tué « madame », le retrait de l'autorité parentale n'est toujours pas systématique. Je suggère donc que la loi prévoie la suspension systématique lorsque l'un des deux parents a tué ou tenté de tuer l'autre, sauf circonstances particulières. Aujourd'hui, même si « monsieur » est en prison, il a encore le droit de décider si l'enfant peut pratiquer l'équitation, partir en colonie de vacances ou fréquenter le centre aéré : c'est aberrant !

Enfin, le dispositif du téléphone portable d'alerte pour femmes en grand danger (TGD) fonctionne, il fait la preuve de son efficacité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion