Intervention de Bernard Cazeneuve

Séance en hémicycle du 26 janvier 2016 à 15h00
Droit des étrangers — Présentation

Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur :

Des décisions ont été prises en juillet dernier ; il est plus que temps qu’elles soient appliquées. Les hotspots doivent devenir des lieux de passage obligatoires pour tous les migrants qui arrivent sur les côtes italiennes et grecques ; ceux-ci doivent y demeurer le temps que l’on effectue les nécessaires contrôles de sécurité et que l’on détermine leur statut : la relocalisation ou le retour.

La France s’est pleinement engagée pour que la politique européenne de relocalisation, via les hotspots, fonctionne au mieux. Nous avons ainsi proposé du personnel auprès de Frontex – 60 personnes – et auprès du Bureau européen d’appui à l’asile – 18 personnes – afin de soutenir les autorités italiennes et grecques. Entre novembre 2015 et janvier 2016, nous avons en outre proposé 900 places pour accueillir des migrants relocalisés sur notre sol, ce qui représente à ce jour le plus grand nombre de places ouvertes par un État membre. Les premières personnes relocalisées depuis l’Italie sont arrivées en France en novembre dernier ; à l’heure où je vous parle, 43 personnes sont en train d’arriver depuis la Grèce ; une cinquantaine d’autres devraient arriver en fin de semaine prochaine de Grèce et d’Italie. La France tient donc ses engagements européens et assume ses responsabilités ; elle est le premier pays d’Europe pour ce qui est de l’accueil des réfugiés relocalisés. Soyez certains que je veille avec la même détermination à ce que les engagements pris par les autorités européennes soient tenus.

Une politique d’immigration efficace et responsable consiste à accueillir sur notre sol les étrangers qui peuvent et doivent l’être, et cela dans les meilleures conditions ; mais elle consiste aussi à reconduire à la frontière, avec humanité mais sans faiblesse, celles et ceux qui se trouvent en situation irrégulière : il s’agit là d’une nécessité si l’on veut garantir la soutenabilité de notre politique migratoire.

Vous savez que sur ce sujet, je tiens à votre disposition les chiffres nécessaires à la compréhension de la situation. L’un d’eux, celui qui mesure le nombre des éloignements forcés, nous permet de saisir l’action des forces de l’ordre suivant la vigueur des consignes données par le Gouvernement en place. Les éloignements forcés étaient de 13 908 en 2009, 12 034 en 2010, 12 547 en 2011, 13 386 en 2012, 14 076 en 2013, 15 161 en 2014 et 15 485 en 2015, ce qui représente une augmentation de 11 % entre 2012 et 2015.

D’autre part, le détail des statistiques nous montre que ce sont les éloignements hors Union européenne qui connaissent l’évolution la plus spectaculaire, avec une hausse de plus de 10 % en 2015, après un point très bas atteint en 2011. Le nombre de filières démantelées est lui aussi toujours plus élevé. Entre janvier et août derniers, nous avons ainsi démantelé plus de filières que ne l’a fait durant toute l’année 2010 ou l’année 2011 le Gouvernement issu de la majorité précédente. Et si je prends la peine de faire ces précisions, c’est que je connais les sempiternelles polémiques entretenues sur le sujet. Je les trouve dérisoires. Aux polémiques, aux approximations, je veux répondre par la rigueur des chiffres.

C’est la même rigueur qui a présidé à l’élaboration par le Gouvernement de la réforme du droit des étrangers qui est à nouveau soumise à votre examen après que la commission mixte paritaire a échoué.

Ce texte permet d’atteindre trois objectifs.

Le premier est de mieux intégrer, grâce au renforcement du parcours d’intégration, qui s’accompagnera d’un rehaussement du niveau d’exigence de maîtrise de la langue française pour que les étrangers atteignent un niveau A2, certes inférieur à celui requis pour une naturalisation, mais suffisant pour la vie courante. Mieux intégrer, c’est aussi mettre un terme au véritable parcours du combattant administratif auquel sont soumis aujourd’hui les étrangers. Les chiffres sont clairs : 2,5 millions d’étrangers extracommunautaires, 5 millions de passages en préfecture, alors qu’1,8 million de ces étrangers sont titulaires d’une carte de séjour valable dix ans. Cela signifie que nous soumettons des centaines de milliers d’étrangers à près d’une dizaine de passages en préfecture par an, ce qui, à l’évidence, ne crée pas les conditions d’une intégration réussie. Aussi tous les étrangers auront-ils désormais accès à un titre de séjour pluriannuel après leur première année de séjour ; ce titre leur permettra d’éviter des allers-retours inutiles et pénalisants en préfecture.

Je reviendrai tout à l’heure sur certains amendements présentés par l’opposition, qui reprennent ceux qui avaient été adoptés par le Sénat contre l’avis du Gouvernement. Néanmoins, je soulignerai dès à présent qu’au-delà des critiques, des postures et, bien souvent, des outrances, si d’aucuns proposent de réduire la portée du titre de séjour pluriannuel, nul ne songe à le remettre en cause.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion