Intervention de Antoine Durrleman

Réunion du 20 janvier 2016 à 16h30
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Antoine Durrleman, président de la sixième chambre de la Cour des comptes :

Le développement de l'HAD suscite effectivement des réticences que, comme vous l'avez senti, la Cour des comptes ne partage pas. Nous avons parlé d'une transgression réussie parce que nos systèmes se sont construits de manière clivée. L'HAD n'est pas indiquée pour toutes les pathologies et en tous lieux car elle a ses propres contraintes. Néanmoins, nous avons la conviction que c'est un chaînon nécessaire, un mode de prise en charge très original pour certains patients souffrant de certaines pathologies, à condition que leur environnement matériel et familial s'y prête. Nous avons pris le soin de décrire le mode d'intervention des structures en HAD afin de bien montrer qu'il y a, pour reprendre le langage des militaires, des précurseurs. Avant d'accepter une prescription en HAD, des émissaires sont envoyés au domicile du patient pour s'assurer que les prérequis sont remplis. Si c'est le cas, l'HAD s'organise.

Les réticences sont liées à des rémanences culturelles mais aussi au manque de documentation. L'HAD a besoin de convaincre les prescripteurs et les financeurs. Les pouvoirs publics ont supprimé le « taux de change » en 2003, puis ils ont mis en place le dispositif de pilotage qui faisait défaut. Mais les réticences demeureront tant que les freins – manque de référentiels sur les indications autorisées et d'études démontrant l'efficience de ce mode de prise en charge – ne seront pas débloqués. Le dispositif se développera sous pression externe, celle des pouvoirs publics, mais il faudra qu'il soit aussi porté par les acteurs du système de santé. Ce pivotement n'est pas évident parce que, madame la rapporteure a raison, nous sommes dans une logique de substitution. Comme les pouvoirs publics l'ont rappelé en décembre 2013, l'HAD doit se substituer à l'hospitalisation conventionnelle ; il s'agit donc d'en tirer les conséquences sur l'hôpital classique. C'est la même chose en ce qui concerne, par exemple, la chirurgie ambulatoire. L'hôpital doit évoluer, ce qui lui permettra d'avoir des moyens pour d'autres types de prises en charge, notamment en cancérologie.

La question de l'adossement systématique est compliquée. Nous constatons que toutes les structures publiques sont adossées à un établissement public de santé, et que les deux tiers des services d'HAD à but lucratif sont rattachés à des cliniques privées. Les services d'HAD indépendants sont gérés par des mutuelles, des fondations ou des associations. Ce paysage des ESPIC est surtout constitué de structures de petite taille, qui peuvent être fragiles, même si on y trouve aussi de très grands ensembles tels que la fondation Santé Service. Dans le rapport de 2014 sur les lois de financement de la sécurité sociale, nous avons eu l'occasion d'étudier un peu ces ESPIC qui ne viennent pas de nulle part : ils ont une histoire et un ancrage local, souvent philosophique. Cet héritage fait que, même quand elles paraissent aller de soi, les fusions nécessaires sont compliquées à conduire. La loi HPST de 2009 pose la question de l'adossement de manière plus pressante qu'auparavant parce que les contraintes sont devenues beaucoup plus rudes.

S'agissant des comparaisons internationales – je parle sous le contrôle d'Esmeralda Luciolli – nous sommes allés au bout de notre savoir parce que nous n'avons pas fait de mission à l'étranger. Vous savez qu'il nous arrive de franchir les frontières pour la MECSS.

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