Intervention de Jeanine Dubié

Réunion du 27 janvier 2016 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanine Dubié :

Les députés du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste pensent que l'agriculture est une composante essentielle de l'identité de la France, que ce soit en termes de superficie, de tradition, de savoir-faire, de vitalité de nos territoires ruraux, d'emplois, de balance commerciale ou de sécurité de notre approvisionnement. C'est pourquoi ils sont attentifs à toute mesure visant à soutenir l'agriculture. Je représente mon groupe au sein de la mission d'information sur l'avenir des filières d'élevage, qui rendra prochainement ses conclusions au terme d'un important travail.

Le chapitre Ier de la proposition de loi vise à rendre plus justes et plus transparentes les relations existantes, du producteur jusqu'au consommateur. Malgré de nombreuses tentatives, nous n'avons toujours pas réussi à rééquilibrer les relations commerciales.

L'article 1er propose que la contractualisation prenne en compte les coûts de production des agriculteurs, pour mieux répartir les efforts à réaliser dans les filières. Si nous sommes favorables à toute mesure visant à favoriser l'entente entre les différents maillons de la filière, cet article ne semble pas apporter de véritable changement par rapport au droit positif, les références existant déjà dans les clauses relatives aux prix ou aux critères de détermination des prix.

L'article 1er bis vise à mettre fin à la cessibilité à titre onéreux des contrats laitiers. Nous y sommes favorables.

Pour améliorer les relations dans les filières, l'article 2 instaure une conférence agricole annuelle qui rassemblerait tous les acteurs de chaque filière, sous l'égide du médiateur des relations commerciales. Si cette proposition semble être une bonne idée, je veux toutefois préciser que, aujourd'hui, rien n'interdit aux acteurs de se réunir sous ce format. Il nous semble donc que cet article ne relève pas de la loi.

L'article 2 bis semble plus hasardeux, en proposant un affichage public par les acteurs eux-mêmes de leurs manquements aux obligations de réponse aux enquêtes statistiques réalisées par l'observatoire de la Formation des prix et des marges des produits alimentaires. L'Observatoire s'est amélioré, mais il peut encore progresser, et la priorité est d'abord de lui donner les moyens d'analyser des chiffres non maquillés, en tout cas plus transparents.

L'article 3 vise à permettre au consommateur de connaître l'origine des produits transformés à base de viande ou de lait. C'est une demande constante des acteurs de la production, que les députés de mon groupe ont systématiquement soutenue. Le dispositif présente toutefois un risque d'incompatibilité avec le droit européen, et les industriels prédisent une hausse des prix allant jusqu'à 30 %. Malgré ces risques, il faut soutenir l'idée. Le Gouvernement doit se battre à Bruxelles, peut-être avec une solution de compromis dans un premier temps, en commençant par une démarche volontaire, ensuite en obtenant à Bruxelles un étiquetage obligatoire au moins des ingrédients principaux. Les agriculteurs et les consommateurs ont tout à y gagner.

Sur le chapitre II visant à « faciliter l'investissement et mieux gérer les risques financiers en agriculture », les mesures paraissent plus fragiles.

La modulation automatique du remboursement du capital des emprunts souscrits par les agriculteurs pour financer l'investissement, lorsqu'une crise intervient dans leur secteur d'activité, est proposée à l'article 4. Si une telle mesure paraît utile, elle serait contestable juridiquement et ne vaudrait que pour les futurs prêts.

L'article 6 vise à améliorer la gestion des risques en agriculture. Il étend la déduction pour investissement et modifie le mécanisme de la déduction pour aléas (DPA) avec une réserve spéciale d'exploitation agricole (RSEA), d'utilisation simplifiée. En fait, c'est une réforme de la DPA proche de celle votée dans le projet de loi de finances pour 2016.

Concernant le chapitre III, l'allégement des charges et des normes, nous sommes favorables aux intentions, mais les articles posent plusieurs problèmes. La simplification, et notamment le classement ICPE, est d'ordre réglementaire. Même si nous avons souvent inséré dans la loi des dispositions de cet ordre, ces dispositions relèvent de la compétence du Gouvernement.

Cette proposition de loi est un travail parlementaire remarquable, que nous saluons. Elle comporte de bonnes intentions, des idées, mais aussi des mesures plus ou moins solides juridiquement, au chiffrage incertain, et parfois déjà mises en oeuvre. Toute la question reste de savoir comment optimiser l'efficacité de l'argent mobilisé pour les agriculteurs, c'est-à-dire de trouver les solutions les plus efficientes.

Dans ces conditions, le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste s'abstiendra.

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