Intervention de Marietta Karamanli

Réunion du 28 janvier 2016 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Je ne partage pas complètement les appréciations précédentes. Ce projet de loi constitutionnelle a beaucoup fait parler de lui. Cette intense médiatisation ferait presque perdre de vue plusieurs éléments que je tiens à rappeler.

En premier lieu, il s'inscrit dans un contexte nouveau, symbolisé par les vies enlevées et meurtries à tout jamais. Le projet de loi constitue un élément de réponse à la menace diffuse et permanente que représente le terrorisme.

Ensuite, cette réforme constitutionnelle comporte deux volets : d'une part, la constitutionnalisation du dispositif de l'état d'urgence et son encadrement, point positif, me semble-t-il ; d'autre part, l'inscription dans la Constitution d'une mesure juridique de rupture avec des criminels qui commettent des actes terroristes ou qui y participent.

Quant à la déchéance de nationalité, elle ne constitue pas une novation. Elle existe dans notre droit et, dans des formes analogues, à l'étranger : quinze États de l'Union européenne disposent d'une législation sur le retrait de la nationalité en cas de trahison ou de déloyauté. Douze d'entre eux prévoient la déchéance de nationalité pour des citoyens qui s'engageraient dans une armée étrangère.

La France a signé la Convention de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie. Nous sommes plusieurs à plaider pour sa ratification, ce qui serait une manière de répondre à Mme Duflot.

Restent la question du périmètre et celle du contrôle du dispositif. Je remercie le Premier ministre d'avoir entendu les interrogations et les craintes exprimées par les députés sur l'insuffisant calibrage de la mesure. Il y a répondu en annonçant que le texte n'établirait pas de distinction entre Français, qu'ils aient ou non une double nationalité, afin de ne pas créer deux catégories de sujets de droit. Il a également fait part de la volonté du Gouvernement de poursuivre la ratification des conventions relatives à l'apatridie. Enfin, il a apporté des garanties juridictionnelles nouvelles qui répondent également à nos préoccupations.

Nous avons à répondre non pas tant à des questions de principe – puisque la mesure existe et est appliquée – mais à des interrogations sur une délimitation stricte et sous contrôle de l'utilisation de celle-ci. Je compte sur notre rapporteur et notre Commission pour avancer dans cette voie.

Faut-il encadrer cette mesure en l'inscrivant dans la Constitution pour éviter toute surenchère ? Quelle sera l'articulation entre le volet constitutionnel et la loi ?

Il faut redonner sa place à la délibération politique. Il ne faut pas avoir peur de dire, sur ce sujet comme sur bien d'autres, qu'il n'existe pas de réponse évidente, simple ou facile et que seule la discussion permet d'avancer.

En conclusion, je veux saluer les efforts de l'exécutif pour écouter le législatif et le remercier pour les discussions en cours.

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