Intervention de Guillaume Larrivé

Réunion du 28 janvier 2016 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Larrivé :

À ce stade de nos débats, je voterai contre les amendements de suppression de l'article 2 et ne prendrai pas part au vote de l'amendement du Gouvernement, pour les raisons suivantes.

Je voterai contre les amendements de suppression de l'article 2, car je suis favorable au principe de déchéance de la nationalité française pour les personnes condamnées pour crime ou délit portant gravement atteinte à la vie de la Nation.

Quant à l'amendement du Gouvernement, il suscite plusieurs interrogations qui doivent être levées avant le débat dans l'hémicycle. Peut-être certaines le seront-elles d'ailleurs par la communication qui nous sera faite, et que nous demandons, de l'avant-projet de loi d'application de cet article. Mais j'aurais une deuxième demande à l'endroit du rapporteur et du nouveau garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas : comment le Gouvernement interprète-t-il la suppression par amendement des mots « qui détient une autre nationalité » figurant dans le projet de loi constitutionnelle ? Nous sommes très nombreux ici à considérer que la création d'apatrides doit être totalement prohibée. L'amendement du Gouvernement n'interdit pas explicitement le retrait de la nationalité française à des personnes qui n'ont que celle-ci – à la différence du projet de loi initial. Dès lors, sans doute le permet-il. Bref, le texte constitutionnel nouveau, si l'amendement du Gouvernement était adopté, interdit-il ou non la création d'apatrides ?

Parallèlement, le Premier ministre nous a annoncé hier qu'il entendait présenter un projet de loi de ratification des Conventions de 1961 et de 1997 prohibant la création d'apatrides. La question qui nous est posée, à nous constituant potentiel, est celle de l'articulation entre la Constitution révisée et les conventions internationales qui seraient ratifiées en droit interne. L'article 54 de la Constitution dispose que si le Conseil constitutionnel, saisi par le Président de la République, par le Premier ministre, par le président de l'une ou l'autre assemblée ou par soixante députés ou soixante sénateurs, a déclaré qu'un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de ratifier ou d'approuver l'engagement international en cause ne peut intervenir qu'après révision de la Constitution. Je ne voudrais pas que l'adoption de l'amendement du Gouvernement nous mette dans une impasse où la Constitution, révisée conformément à l'amendement du Gouvernement, n'interdirait pas la création d'apatrides alors même qu'une loi de ratification serait votée pour l'interdire, car cette loi de ratification ne pourrait être adoptée sans révision de la Constitution alors que celle-ci viendrait tout juste d'être modifiée. Il y a là une vraie interrogation technique et juridique qui doit être levée par le rapporteur et par le ministre de la Justice.

J'ajoute que cet amendement, par construction, n'a fait l'objet d'aucune saisine du Conseil d'État et que les conditions dans lesquelles il a été préparé ne dissipent pas les interrogations qui subsistent. D'ici à la séance publique du 5 février, il est absolument nécessaire que le Gouvernement clarifie pleinement cette articulation.

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