Intervention de Emmanuelle Piet

Réunion du 19 janvier 2016 à 13h45
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Emmanuelle Piet, présidente du Collectif féministe contre le viol, CFCV :

Je tiens avant tout à rappeler deux choses.

D'abord, la question de l'opportunité des poursuites pose problème dans les affaires que nous défendons. En effet, lorsque nous signalons des excisions dans le cadre de la protection maternelle et infantile (PMI), les affaires peuvent être classées sans suite. Ou lorsque des personnes portent plainte pour viol – et elles sont pourtant peu nombreuses à le faire –, les affaires sont classées pour un grand nombre d'entre elles, faute d'éléments de preuve suffisants ou parce que la victime n'est pas crédible, ou que sais-je encore.

Ensuite, les violences faites aux femmes sont très sous-évaluées. Si 134 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint l'année dernière, il faut savoir que sur les 32 hommes morts sous les coups de leur compagne chaque année, les trois quarts étaient violents avec celle-ci. En outre, le nombre de femmes tuées ne tient pas compte des celles qui sont mortes en réanimation quinze jours après leur agression, ni de celles qui se sont jetées du quatrième étage par désespoir.

J'en viens aux deux points de la législation.

Sur la légitime défense, le CFCV ne s'est pas prononcé, mais comparé au jugement très récent sur l'affaire de Bobigny, la peine infligée à Jacqueline Sauvage – dix ans de prison – est sidérante ! D'ailleurs, j'ai vu des maris condamnés seulement à deux ans de prison avec sursis pour avoir tué leur femme, et des pères condamnés à trois ans de prison avec sursis pour avoir violé leurs filles ! On peut donc parler d'une justice machiste, puisque les femmes paient toujours plus cher que les hommes en matière de violences conjugales. Néanmoins, les moyens de notre justice – dans un état de misère absolue à Bobigny ! –, expliquent la légèreté des peines pour violences faites aux femmes. Dans ce contexte, il est difficile de parler d'égalité de traitement et de justice de qualité.

Sur le féminicide, le CFCV persiste à dire que les violences faites aux femmes restent peu visibles. Aussi la reconnaissance du crime de féminicide donnerait-elle une visibilité à ce meurtre spécifiquement sexué.

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