Intervention de Emmanuel Levacher

Réunion du 27 janvier 2016 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Emmanuel Levacher, président de Volvo Group Governmental Sales et président-directeur général de Renault Trucks Defense et Panhard :

J'aimerais revenir sur votre inquiétude au sujet de la Suède.

Je connais bien ce pays pour y aller souvent et j'ai noté ces derniers temps un fort changement d'attitude : les Suédois parlent de rejoindre l'OTAN, ce qui était inimaginable il y a quelques années ; l'opinion publique est en train de basculer. Même s'ils ont davantage en tête la menace russe, ils ont pris conscience du fait qu'ils étaient allés un peu trop loin dans la baisse des budgets de défense et ils font partie des pays qui ont assez fortement infléchi la courbe en augmentant à nouveau leurs dépenses militaires. L'image d'une Suède neutraliste, différente des autres pays européens, est sans doute dépassée. Aujourd'hui, il y a une convergence de points de vue avec des pays comme la France.

Par ailleurs, il n'est pas anecdotique de souligner que le nouveau président du groupe Volvo, Martin Lundstedt, a vécu en France lorsqu'il était patron de Scania à Angers : il parle français, il connaît bien les mécanismes des marchés militaires en France – il a réussi à vendre quelques véhicules Scania à la DGA. Il se montre très ouvert et n'a sans doute pas les mêmes préventions que son prédécesseur. Je peux vous assurer que mes collègues et moi-même n'avons aucun problème de communication avec la direction : nous nous comprenons parfaitement et pouvons faire avancer nos affaires en toute transparence, dans une atmosphère de bonne entente.

Ces deux éléments m'amènent à penser qu'il n'y a aucune raison de s'inquiéter d'éventuelles différences d'approche entre la France et la Suède.

En ce qui concerne les licenciements, je le répète, le plan social ne nous concerne pas directement, il s'applique à Renault Trucks, qui est une entité différente, qui ne produit que des camions civils. Pour ce qui concerne RTD, il n'y a eu aucun licenciement ; bien au contraire, nous avons embauché. Il n'y a pas d'inquiétude particulière à avoir en ce qui concerne les sites français. Bien sûr, cinq usines pour une entreprise qui réalise 500 millions de chiffres d'affaires, ce n'est pas forcément optimal d'un point de vue industriel. Cela peut même faire beaucoup. Mais c'est le résultat de l'histoire, avec l'acquisition de Panhard et ACMAT. Il n'y a pas de souci à avoir à court terme, ces usines ont une charge de travail devant elles.

Notre société a une sensibilité particulière aux questions de défense nationale : certains de nos salariés sont d'anciens militaires et ceux qui viennent du civil sont intéressés par ces sujets. Plusieurs de nos collègues, cadres ou non, sont réservistes. Nous tentons de les aider en faisant en sorte qu'ils puissent partir jusqu'à quinze jours par an pour accomplir leurs périodes sans avoir à prendre de congés. Nous traitons de façon intuitive cet aspect mais nous aimerions qu'il y ait un cadre réglementaire pour organiser de façon plus systématique ce temps libéré. Chantal Dognin a déjà noué des contacts avec le ministère du Travail pour proposer des idées afin de donner à ces salariés la possibilité de s'absenter sans trop pénaliser l'entreprise. Nous sommes très intéressés par le résultat de ces échanges.

S'agissant du rapprochement entre Nexter et KMW, nous avons une position d'observateur. Très sincèrement, je leur souhaite de réussir. Il est très important pour la France et la construction européenne de l'industrie de défense que cette alliance soit couronnée de succès. Je n'ai pas d'opinion précise, je n'ai d'ailleurs pas beaucoup d'informations. Cela sera un processus long et sans doute difficile car il n'y a pas de programme structurant à ce stade, qui permette de construire un partenariat. Nous n'avons pas le projet de rejoindre cette alliance. En revanche, nous souhaitons continuer à travailler en partenariat ponctuel avec Nexter sur les programmes actuels et peut-être sur des programmes futurs. Nous sommes déjà engagés avec cette société dans le cadre du programme Scorpion jusqu'à 2031, peut-être même au-delà avec le MCO. Il nous faut absolument poursuivre cette collaboration, quelle que soit la configuration.

J'en viens à notre stratégie de croissance. Pour l'instant, nous n'envisageons pas de grands partenariats stratégiques, nous misons plutôt sur une croissance organique. Compte tenu de nos carnets de commandes, nous nous situons dans une trajectoire de doublement de notre chiffre d'affaires d'ici à 2018-2019, ce qui nous permettra d'atteindre une taille suffisante pour développer de nouveaux produits et continuer à mener une gestion saine. La multiplication des implantations à l'étranger n'est nullement synonyme de dispersion : nous partons simplement du constat que pour réussir à s'implanter durablement dans des pays qui, à l'instar de la France, ont une industrie locale ou des fournisseurs réguliers, il faut une présence locale. Nous avons la chance de pouvoir utiliser comme points d'appui des infrastructures du groupe Volvo : au Canada, nous avons recours pour certaines étapes d'assemblage aux usines de Prévost Bus, société spécialisée dans la construction de bus interurbains et d'autocars de tournée pour les stars. Cela permet tout à la fois de se conformer aux exigences de nos clients en matière de production locale et de développer une relation de proximité.

Nous ne voulons pas nous disperser, nous n'avons d'ailleurs pas l'intention de développer d'autres implantations. Nous en restons à nos trois implantations : l'Amérique du Nord, qui constitue une priorité avec Mack Defense ; l'Europe du Nord, compte tenu des investissements que font dans leur armée des pays comme la Suède, la Finlande, la Norvège, les pays baltes, les pays d'Europe centrale, en particulier la Pologne ; l'Australie, implantation qui est davantage le fruit de l'histoire – Mack ayant vendu beaucoup de camions à l'armée australienne, l'une de nos usines vit essentiellement des opérations de MCO.

Il m'a été demandé si nous faisions preuve de créativité en matière de MCO. Nous essayons mais notre ambition est avant tout de nous adapter aux demandes de nos clients. Nous sommes très à l'écoute de leurs besoins, qu'il s'agisse de la SIMMT ou de la section technique de l'armée de terre (STAT). Nous av ons ainsi lancé un grand projet interne destiné à développer une nouvelle offre de MCO pour répondre à l'évolution de la demande de nos clients. Cela impliquera, si nécessaire, de prendre en charge certaines activités externalisées, éventuellement en partenariat – nous avons signé une convention avec le SMITER.

Je termine par le Koweït. Les accords de principe sont là. Ils n'ont pas encore abouti à des accords définitifs mais le processus est en bonne voie. J'espère pouvoir vous en donner les résultats d'ici à quelques semaines. Nous sommes confiants.

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