Intervention de Laurent Furst

Séance en hémicycle du 2 février 2016 à 15h00
Économie bleue — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Furst :

Il est vrai que ma circonscription est l’une des plus éloignées des côtes maritimes de notre pays !

J’ai souhaité m’exprimer car je crois que l’économie, trop souvent considérée comme la logistique des ambitions françaises et des rêves de notre société, deviendra une question centrale au regard des faiblesses de notre nation en la matière. Une nation est prospère quand elle a envie de l’être, c’est-à-dire avant tout quand elle se dote d’un cadre juridique et social propre au développement du tissu économique. Or l’économie bleue, c’est avant tout une affaire d’entreprises, petites et grandes, dans des secteurs divers mais qui contribuent tous à la prospérité du pays.

L’histoire de France nous apprend également que pour un certain nombre de domaines d’activité, le libéralisme économique, le laisser-faire ne suffit pas : il convient alors de fixer des objectifs, d’organiser les moyens, et de structurer les filières. Au point de vue philosophique, je suis assez libéral, mais je crois qu’une forme de colbertisme doit prévaloir dans un certain nombre de domaines, parmi lesquels les énergies renouvelables, la filière bois – dont on parle beaucoup trop peu –, la filière agroalimentaire et – bien sûr – les métiers de la mer.

J’ai la conviction que la mer présente de nombreuses opportunités pour créer de la richesse et des emplois ; mais pour y parvenir, il faut avoir une vision d’ensemble du sujet, et une ambition structurée.

Ayant cette conviction profondément ancrée en moi, je ne pouvais que me réjouir du principe même de ce texte, et je ne doute d’ailleurs ni de la sincérité, ni de la qualité de l’engagement de son auteur. Cela dit, si certains aspects vont évidemment dans le bon sens, l’ambition me paraît manquer de souffle. Il y a défaut d’audace et, vous excuserez cette mauvaise image, le texte me semble davantage relever du cabotage côtier que d’une volonté de gagner le grand large.

Pourtant la France, deuxième potentiel maritime du monde, a des opportunités considérables en matière de pêche, de production énergétique, de transports et de métaux rares. Dans chacun de ces domaines, elle a une double opportunité : celle des ressources à notre portée, mais aussi celle du développement des industries destinées à capter et à transformer tout ce que la mer peut nous donner. Sur ces deux aspects, les champs de développement sont quasiment infinis, et le potentiel économique est immense. L’« économie bleue » doit être non seulement un beau titre, mais une ambition globale, une ambition nationale.

La France peut, dans ce vaste domaine, jouer un rôle majeur. Je ne dis pas que nous n’avons rien fait, mais il reste tant à faire… Nous avons, dans ce pays, des talents, le potentiel et même les moyens financiers : reste à fixer un cap, à choisir un capitaine.

Malheureusement, j’ai le profond regret de voir que la France n’a pas de vraie ambition en la matière, même si, ponctuellement, des initiatives intéressantes peuvent être relevées. Nous devrions partager une vision commune, et la partager au service de la prospérité de toute la nation, sans pour autant abîmer, bien sûr, le formidable potentiel environnemental que représentent les 11 millions de kilomètres carrés sous administration de notre nation. Au fond, je déplore l’absence, en France, d’un ministère de la mer et – c’est ce « et » qui est important – de l’économie maritime, afin de tendre vers cet objectif.

Je veux évoquer un deuxième sujet, celui des terres australes et antarctiques françaises, auxquelles j’ajouterai l’îlot de Clipperton dans le Pacifique. Le droit international reconnaît à la France plus de 2,5 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive autour de ces îlots et terres inhabitées. Ces îles constituent le bien commun de toute notre nation, même si elles sont parfois loin des yeux et du coeur de nos concitoyens. Elles présentent des richesses halieutiques : je pense en particulier à la légine, aux Kerguelen, et au thon à Clipperton ; elles offrent aussi des richesses en matière d’hydrocarbures, au large des îles éparses du canal du Mozambique. Il y a enfin, peut-être, au fond de l’océan, les richesses de demain, les nodules polymétalliques et terres rares qui pourraient faire la prospérité de notre nation. À titre personnel, je regrette que nous soyons peut-être prêts à céder aux revendications de cogestion de Maurice pour l’îlot de Tromelin. La revendication de Madagascar pour les îles du canal du Mozambique ne cesse également de se renforcer sans que la France affirme une position forte. Les grandes nations sont celles qui défendent leurs îles.

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