Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous sommes tous d’accord pour ne pas confondre le hooliganisme, fait d’une minorité d’individus violents, et le supportérisme qui, lui, est festif, populaire et pacifique, et qui ne doit pas disparaître de nos stades. Au contraire, il doit être conforté car nous ne voulons pas de stades aseptisés.
C’est pourquoi la proposition de loi de lutte contre le hooliganisme de notre collègue Guillaume Larrivé mérite, et il en a convenu, d’être complétée dans son titre comme dans son contenu, rééquilibrée, ainsi que l’a dit M. le secrétaire d’État dans son intervention liminaire, en prévoyant des mesures renforçant le dialogue avec les associations de supporters. Tel est le sens des amendements que François de Rugy et moi avons déposés, issus de la proposition de loi sur laquelle nous avions travaillé il y a quelques mois.
Il s’agit de mieux reconnaître la représentativité et la représentation des associations de supporters dans les instances nationales du sport pour qu’elles deviennent des interlocutrices privilégiées des pouvoirs publics et des ministères concernés, mais aussi des clubs professionnels à travers la désignation de référents chargés des relations avec les supporters.
La proposition de loi renforce les sanctions à l’encontre des violences commises dans les stades et aux abords. C’est nécessaire. Nous ne devons pas nier les phénomènes de violence qui empoisonnent aujourd’hui régulièrement certaines rencontres sportives, essentiellement des matchs de football, il faut bien le reconnaître – sur 367 interdictions administratives de stade l’an dernier, seules six concernaient d’autres disciplines, en l’occurrence le basket et le rugby. Mais au regard des 30 000 matchs de football organisés chaque week-end dans notre pays, il apparaît que les actes de violence n’en concernent qu’un petit nombre. Il faut par conséquent relativiser aussi l’interdiction de déplacements – quelques dizaines ces derniers mois –, même si je sais qu’elles sont mal vécues et fortement pénalisantes pour les supporters concernés.
Je vais citer deux exemples de violences récentes inacceptables et que vous avez tous en tête. Le premier, à l’occasion du dernier derby à Lyon entre l’Olympique lyonnais et l’Association sportive de Saint-Étienne, ce sont les neuf blessés, dont un stadier lyonnais qui a été grièvement blessé, perdant l’usage d’une de ses mains en ramassant ce qu’il pensait être un fumigène alors qu’il s’agissait d’un engin explosif ; lors de la même soirée, Georges Bereta, un ancien joueur de l’ASSE, a failli être lynché à la sortie du stade. Et puis quelque temps plus tard, une dizaine d’ultra-violents stéphanois ont mené une expédition punitive pour aller saccager un mariage dans le Beaujolais, croyant s’en prendre à un supporter lyonnais, et condamnés à de la prison ferme.
J’ajoute que les rencontres classées à risque de Ligue 1 ou de Ligue 2 sont fortement consommatrices en moyens humains, qu’il s’agisse de CRS, de gendarmes mobiles ou de policiers, avec parfois même l’utilisation d’hélicoptères, les effectifs s’élevant souvent à plusieurs centaines, voire cinq cents à six cents. Chacun peut se rendre compte du coût financier que cela représente à la fois pour les clubs et pour l’État, alors que ces moyens devraient pouvoir être consacrés plus utilement à la sécurité de nos concitoyens, a fortiori dans un contexte d’état d’urgence face à la menace terroriste qui en fait une priorité. Le climat dans les stades de foot et aux abords doit être paisible, ce qui n’empêche pas la fête – M. le secrétaire d’État l’a rappelé.
L’article 1er a été réécrit en commission. Il permettra aux organisateurs de manifestations sportives de refuser la vente de billets ou l’accès au stade aux personnes portant atteinte aux dispositions prises par les organisateurs pour le bon déroulement et la sécurité desdites manifestations. Cet article répond à une logique : étant co-responsables de la sécurité au sein des stades, ils doivent disposer des moyens d’y contribuer de façon effective. Des progrès ont été réalisés dans ce sens : M. le secrétaire d’État a pu le constater le 22 novembre dernier en venant visiter le PC sécurité du stade Geoffroy-Guichard lors de la rencontre ASSE-Olympique de Marseille. Il a vu la coordination des services de la police nationale, de la police municipale, des gendarmes et des stadiers, et les moyens de vidéo-surveillance mis en oeuvre.
Je voudrais tout de même que vous puissiez mettre fin à certaines inquiétudes, voire certaines craintes, suscitées par cet article. Bien sûr, le fichier tenu par les organisateurs de manifestations sportives sera soumis à un avis de la CNIL et mis en oeuvre dans les conditions définies par le Conseil d’État, mais peut-on s’assurer qu’un tel fichier sera bien utilisé pour écarter les personnes violentes et non pour effectuer un tri sur d’autres critères ? Il s’agirait par exemple d’écarter les supporters pas tout à fait dans la ligne de la direction du club. Il sera important que vous puissiez, lors de la discussion des articles, nous apporter des garanties et des précisions sur les contrôles qui seront effectuées, et ainsi nous rassurer sur la portée de l’article 1er.
Je suis entièrement d’accord avec l’article 2, qui renforce les mesures d’interdiction administrative de stade. Elles ont prouvé leur efficacité.
Dès lors que les amendements que François de Rugy et moi-même avons déposés sur la question de la représentation des supporters seront favorablement accueillis et que vous aurez apporté des garanties sur l’article 1er, c’est un texte que je pourrai voter.