La refonte de la chronologie des médias ne saurait, à elle seule, apporter une réponse satisfaisante aux problèmes évoqués. Toute modification la concernant se traduit immédiatement en termes de financement. On ne peut pas enlever une fenêtre d'exclusivité de diffusion à l'un des acteurs de cette chronologie des médias en lui demandant de continuer à contribuer au financement comme si de rien n'était. Il faut cependant chercher avec les nouveaux entrants un mode de financement harmonieux et vertueux.
L'ARP participe à un programme expérimental visant à diffuser simultanément, en salle et sur des plateformes de VOD, certains types de film. Or nous assistons à une radicalisation du marché, entre des films de moins en moins chers et des films qui le sont de plus en plus, ce qui débouche sur deux économies sensiblement différentes. Dans ces conditions, comment définir un système satisfaisant pour tous ? Le budget de promotion d'un film est nécessairement en rapport avec son budget de production. En dessous de 2,5 millions d'euros, les films sont condamnés à un score modeste et risquent de se trouver marqués pour toujours du sceau de l'échec. Dans de tels cas, pourquoi ne pas utiliser le numérique comme un outil partenaire de la salle, voir comme un outil purement promotionnel ? On pourrait même envisager des présentations en amont sur des plateformes de VOD afin d'optimiser la future sortie en salles en la précédant d'un bon bouche à oreille. Des expérimentations sont en cours à cet effet. Mais on se heurte pour cela à des blocages en provenance des distributeurs et des exploitants, qui voudraient sacraliser la salle. Or il faut aussi les écouter…
Une autre piste de réflexion en faveur de la participation des acteurs du numérique au financement du cinéma consiste à se référer à la définition de la télévision, « transmission à distance d'images et de sons. » Internet et ce qu'on appelle les « tablettes » ne font pas autre chose puisqu'il s'agit, en réalité, d'écrans. You tube est, de fait, devenue une véritable télévision et, finalement, se présente comme telle aux consommateurs. Mais elle n'en revêt pas le caractère juridique et ne se trouve pas soumise aux mêmes obligations. En effet, tous ces hébergeurs font de la télévision et se présentent comme tels d'un point de vue marketing, mais ne se nomment pas ainsi, afin de ne pas tomber sous le coup des obligations applicables à la télévision. Il conviendrait donc de renommer les acteurs du numérique selon leurs fonctions réelles et non par rapport à la dénomination qu'ils se sont donnée eux-mêmes, ce qui permettrait de travailler sur la base de principes simples et objectifs.
Enfin, souvenons-nous que la plupart des personnes exerçant des métiers du cinéma sont mues par des motivations artistiques beaucoup plus que commerciales et que les acteurs, pour perdurer, doivent faire preuve de persévérance et consentir bien des sacrifices, y compris financiers car rien ne leur est jamais acquis.