Intervention de Patrick Ollier

Réunion du 17 janvier 2013 à 10h00
Délégation aux outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Ollier :

J'estime que personne d'autre que vous n'était aussi légitime dans cette fonction de parlementaire en mission, même si nous ne partageons pas toujours les mêmes idées. J'ai beaucoup de respect pour votre compétence, votre connaissance des problèmes et votre intelligence pour trouver des solutions, au-delà des clivages politiques.

Vous avez quasiment tout dit. Je partage votre combat depuis vingt ans et j'ai toujours essayé d'aller dans ce sens lorsque j'étais président de la commission des Affaires économiques. J'avais d'ailleurs incité le précédent Gouvernement à demander une dérogation aux normes européennes pour la Guyane. Et je dis la même chose que vous, aux pages 8 à 15 de mon rapport budgétaire.

Je pense que vous serez en mesure de proposer les bonnes solutions au Président de la République et au Premier ministre. Mais il faudra qu'ils aient la volonté de se battre contre la technostructure et la lourdeur des prises de décision européennes !

Il s'agit, en fait, de mettre en place une réelle politique d'aménagement du territoire, laquelle implique de tenir compte de la spécificité des espaces géographiques, quels que soient les traités et les contrats – une spécificité qui existe tout autant dans les zones de montagne de l'hexagone ! Pour compenser les handicaps et rétablir les équilibres, il faut des dispositions permettant de le faire, ce qui est le cas de l'article 349. Son dernier alinéa prévoit, en effet, que le Conseil arrête ses mesures, en tenant compte des caractéristiques et des contraintes des RUP, sans nuire à l'intégrité et à la cohérence de l'ordre juridique de l'Union. On notera, par ailleurs, que personne ne veut nuire à cette intégrité ! Il suffit d'établir clairement la hiérarchie des normes, une hiérarchie qui est indispensable en ce domaine. À cet égard, certaines situations, telles que l'imposition du bois de hêtre de Guyane, sont toujours aussi absurdes.

Je soutiens les orientations que vous avez exposées. Il n'y a rien de pire que de pousser un territoire à s'engager dans la monoculture – j'ai vu notamment, dans le Sud-Ouest, les conséquences terribles de la monoculture du maïs. Le changement de modèle que vous proposez est courageux et il constitue la seule solution viable. À cet effet, il faut cesser de compter sur des habitudes anciennes débouchant sur des systèmes qui ne fonctionnent plus.

Le tourisme constitue la pierre angulaire. Il faut, pour cela, que la politique de grand voisinage soit réellement établie. La territorialisation des politiques économiques est, à cet égard, essentielle.

J'ai apprécié que vous préconisiez de passer d'une politique de guichet à une politique de projets. C'est d'ailleurs l'argument que j'ai utilisé concernant l'article 6 de la loi pour la cohésion sociale de 2004 pour les zones financées par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et pour faire en sorte que les villes dites riches puissent accéder à des programmes environnementaux. Mais il faut être prudent car la politique de projets comporte parfois des excès : dans le cas que je viens d'évoquer, la multiplication des demandes avait en effet asséché la première vague de crédits prévus. Il faut, à cet égard, prévoir des cliquets de sécurité pour éviter que l'on ne vous oppose des risques de dérapage financier.

S'agissant de l'attitude des pays de l'Est, j'étais pour ma part plus favorable à l'approfondissement de l'Union européenne qu'à son élargissement, pour ne pas affaiblir les politiques conduites. D'un autre côté, on ne pouvait laisser ces pays en déshérence après la chute du mur de Berlin. Ils se trouvent dans la même situation que l'Espagne et le Portugal jadis – on peut rappeler que si le Portugal a rattrapé son retard, c'est parce que l'Union a consacré des milliards d'euros à financer ses investissements ! Il faut un juste équilibre entre les crédits accordés aux États membres de l'Union et ceux dont bénéficient les RUP. Or, les mesures prises ne donnent pas l'impression que l'article 349 est réellement appliqué.

L'enjeu de votre mission est exceptionnel : j'ai le sentiment que le Gouvernement a la réelle volonté de le prendre en compte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion