Si le projet de loi ouvre aux couples de personnes de même sexe le mariage et, par voie de conséquence, l'adoption, il ne modifie en rien la présomption de paternité exposée à l'article 312 du code civil et ne permet donc pas la reconnaissance de l'enfant du conjoint au sein d'un couple homosexuel. En effet, la rédaction de cet article – « l'enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari » – ne permet pas de l'appliquer à un couple de personnes de même sexe. Ce choix de ne pas créer une présomption de parenté au sein des couples homosexuels semble justifié, pour des raisons qui ne sont d'ailleurs pas identiques selon que le couple unit deux hommes ou deux femmes.
Pour les couples de femmes, la difficulté est la suivante. Aujourd'hui, le mari peut contester sa paternité en montrant qu'il n'est pas le père biologique, notamment en prouvant que l'enfant est né d'une infidélité. Le principe même de la présomption simple est en effet qu'on peut la renverser. Mais, si l'épouse devenue mère par présomption disposait de cette possibilité de contestation, alors qu'elle sait évidemment pouvoir prouver qu'elle n'est pas la mère biologique de l'enfant, le risque serait grand de déstabiliser la filiation. Pour s'en prémunir, il faudrait alors interdire toute contestation, ce qui contraindrait toute épouse à assumer la responsabilité de tout enfant né de sa femme, même s'il est issu d'une infidélité.
Au sein des couples d'hommes, aucune naissance n'est par définition possible. Si l'un des deux conjoints devient parent d'un enfant, ce ne peut être que par adoption ou par reconnaissance. Dans le premier cas, s'il adopte seul un enfant qu'il aurait légalement pu adopter en couple – ce que la loi permettra –, l'on ne saurait imposer à son conjoint d'en devenir automatiquement le père. Dans le second, s'il reconnaît un enfant dépourvu de filiation maternelle, il s'agit d'une GPA, que notre droit n'admet pas.
Pour ces raisons, la présomption de parenté, intellectuellement séduisante, semble toutefois difficile à intégrer dans notre droit. Avis défavorable.