Intervention de Barbara Romagnan

Séance en hémicycle du 9 février 2016 à 15h00
Protection de la nation — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Romagnan :

Quelle que soit sa réécriture, l’article 2 nous pose problème. Soit il concerne tous les Français et, dans ce cas, nous prenons le risque de créer des apatrides et donc de contrevenir à la déclaration des droits de l’homme ; soit il ne concerne que les binationaux et il pose un problème de rupture d’égalité.

On nous dit que cette mesure ne concerne que les terroristes : en fait, elle ne les concerne même pas puisqu’ils s’en moquent totalement. On prétend aussi qu’elle nous fait du bien, en raison de sa dimension symbolique. Je suis sensible à cet argument, car je crois moi aussi qu’il est important qu’on puisse marquer la différence entre eux et nous. C’est pourquoi l’indignité nationale était, à mes yeux, une proposition appropriée.

De qui s’agit-il concrètement ? Parmi les quinze derniers auteurs d’actes terroristes commis sur le territoire français, se trouvaient, si je ne me trompe pas, deux binationaux : un belgo-marocain – cette mesure ne peut évidemment pas le concerner – et Mohamed Merah, que nous considérions comme franco-algérien mais que l’Algérie n’a pas voulu reconnaître. La conséquence, c’est que nous le gardons !

Nous envoyons par ailleurs un message très négatif, tout d’abord à tout le pays, et non pas simplement aux binationaux : en effet, ce message contient en lui un soupçon à l’encontre de tous ceux qui ne seraient pas exclusivement français, alors même que les binationaux n’ont pas nécessairement choisi de l’être et que, surtout, les enfants binationaux sont de plus en plus nombreux en raison du nombre grandissant de couples binationaux. C’est le cours de l’histoire. Les gens voyagent, migrent et se mélangent : c’est une bonne nouvelle et nous devrions en être heureux.

C’est enfin un bien mauvais message envoyé au monde, puisqu’il sous-entend que des nationalités – la nôtre – ne souffriraient pas l’association avec le terrorisme, tandis que d’autres la souffriraient davantage, alors que ces enfants sont français, qu’ils sont nés en France et que c’est nous qui les avons élevés. Je pense que nous devons assumer nos responsabilités.

Autrefois, nous prétendions exporter nos valeurs universelles à travers le monde. Je trouve dommage que nous proposions aujourd’hui d’envoyer nos enfants criminels aux autres pays.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion