Intervention de Christophe Caresche

Réunion du 2 février 2016 à 16h30
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Caresche, co-rapporteur :

Une première réflexion avait été esquissée par l'Assemblée nationale sur l'influence et la présence française en mai 2004, avec le rapport de notre collègue Jacques Floch intitulé « Présence et influence de la France en Europe : le vrai et le faux ». Ce rapport concluait que « contrairement à certaines idées reçues particulièrement tenaces, notre pays n'a pas à rougir de son rang et de son influence en Europe. Pour autant, certaines faiblesses structurelles pourraient nous nuire de façon irréversible si rien ne change ».

Depuis 2004, l'Europe a changé de visage, et la France a dû repenser son rôle au sein de celle-ci. Le passage d'une Europe des quinze à une Europe des vingt-huit, le « non » français au référendum de 2005, la crise économique et budgétaire qui traverse le vieux continent depuis 2008 justifient pleinement un nouveau rapport sur le sujet.

Le présent rapport englobe à la fois les questions de présence et les questions d'influence, qu'il convient cependant de bien distinguer. La présence française dans les institutions européennes est évidemment une composante fondamentale de l'influence française en Europe, mais une composante parmi d'autres, et il serait erroné d'avoir une vision purement statistique de la notion d'influence – même si c'est un indicateur important que nous traitons avec beaucoup de rigueur dans le rapport.

Toutefois, plus qu'une cause, la présence française est parfois un révélateur de la perte d'influence de notre pays en Europe.

Pour s'en rendre compte, le journal « Politico » parlait en juin 2015 du « G5 » pour désigner les hommes politiques les plus influents des institutions européennes, à la Commission européenne et au Parlement européen. Force est de constater que parmi ces cinq hommes ne figure aucun Français. Un Luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, préside la Commission européenne, et son Premier Vice-président, Frans Timmermans, est néerlandais. Un Allemand, Martin Schultz, préside le Parlement européen. Un Allemand, Manfred Weber, qui préside le groupe PPE. Enfin, un Italien, Gianni Pitella, préside le groupe S&D. À cela s'ajoute Donald Tusk, polonais, qui préside le Conseil européen. Une Italienne, Frederica Mogherini, qui occupe le poste de Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Un Italien, Mario Draghi, qui préside la Banque centrale européenne, en remplacement du Français Jean-Claude Trichet. Pour moi, cette une du journal « Politico » est un constat criant de l'absence de Français au plus haut niveau des décideurs européens.

Nous avons identifié quatre facteurs principaux de déclin de l'influence française en Europe.

Premièrement, les élargissements successifs à l'Est, qui ont contribué à éloigner la France du coeur de l'Europe. Deuxièmement, les difficultés de la France à moderniser son économie et à respecter ses engagements budgétaires, qui ont diminué sa crédibilité sur la scène européenne : cela a été souligné par beaucoup de nos interlocuteurs. Troisièmement, la faiblesse de la France au Parlement européen, accentuée par le résultat des dernières élections, alors que, parallèlement, les pouvoirs du Parlement européen n'ont cessé de s'accroître au fil des traités. C'est un sujet majeur, qui s'explique par plusieurs facteurs : le fait que nous ayons accepté peut-être à tort une remise à niveau du nombre de parlementaires européens, qui a été plus défavorable à la France qu'à d'autres pays et en particulier qu'à l'Allemagne, mais aussi une dispersion plus forte pour la délégation française dans les différents groupes politiques du Parlement européen. Enfin, plus récemment, la percée du Front National a contribué à affaiblir notre pays au Parlement européen.

Enfin, la faible lisibilité de la vision que porte aujourd'hui la France pour l'Europe de demain contribue à notre affaiblissement sur la scène européenne.

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