Intervention de Benjamin Lemoine

Réunion du 10 février 2016 à 17h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Benjamin Lemoine, chargé de recherches au Centre national de la recherche scientifique :

Pour la communauté financière, la référence aux générations futures ne veut rien dire. Les agences se posent une question : est-ce que l'État tient ses engagements sur ses contrats financiers ? Plus précisément, elles tracent une courbe d'évolution démographique pour détecter un vieillissement de la population et sa conséquence : les personnes vieillissantes vont exiger leur pension de retraite et venir concurrencer directement les possesseurs d'actifs financiers, donc les détenteurs de bons du Trésor.

D'une certaine manière, le monde financier est dans la lutte des classes. Vous parlez des Français qui possèdent des actifs, mais, en fait, il ne s'agit que d'une partie de la population : la catégorie sociale qui a pu épargner et placer en bons du Trésor, ce qui nous ramène à l'audit de l'épargne.

« Pour moi, le futur n'existe pas », a dit un jour le responsable d'une agence de notation. Tout est dans le présent, tout est question d'arbitrages entre différentes politiques publiques. Choisit-on de réformer l'État social pour aménager et payer la dette financière, tenir ses engagements, améliorer sa signature financière, être un bon élève des marchés financiers ?

En Grèce, Syriza a voulu procéder à un autre arbitrage en annonçant que le pays ne ferait pas défaut sur sa dette sociale. Puis est venue la vague de la contrainte, le verrou politique. La toxicité politique l'a emporté dans l'autre sens, et des sanctions progressives ont fini par étouffer cette tentative. Un éditorialiste politique peut analyser la situation en ces termes : on a réussi à ensevelir cette option de réarbitrage en faveur de la dépense publique. Cet épisode vient nuancer vos propos : le laxisme budgétaire n'est pas l'option qui triomphe perpétuellement. En fait, certains arbitrages tendent au contraire à défendre une politique favorable au maintien dans le temps du remboursement, du paiement des coupons d'intérêt, à la classe des personnes qui ont des revenus leur permettant d'épargner.

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