À Force ouvrière, nous sommes très méfiants envers la « compétitivité » depuis que la puissance publique en use à tout propos, soit depuis 2009-2010. Cette notion nous semble le plus souvent un prétexte à la modération salariale, voire à terme à la remise en cause du financement de la protection sociale, et à l'introduction d'une plus grande flexibilité dans le droit du travail. Dernièrement, le Gouvernement lui-même en a fait un des objectifs de la modernisation de l'action publique, la MAP, qui n'est que la poursuite et l'aggravation de la révision générale des politiques publiques, la fameuse RGPP.
Pour toutes ces raisons, nous craignons l'instrumentalisation d'une terminologie qui stricto sensu ne veut rien dire, puisqu'elle n'est définie, ni sur le plan économique, ni sur le plan social. C'est pourquoi nous dénonçons la stigmatisation du coût du travail à laquelle se livre le rapport Gallois et comme le pacte de compétitivité, qui en font le responsable de tous les maux de l'économie française.
Nous approuvons en revanche tout ce qui est susceptible d'améliorer la compétitivité « hors coût », via notamment l'intervention de la puissance publique. De ce point de vue, des initiatives telles que la Conférence nationale de l'industrie et ses comités stratégiques de filière, ou encore la future Banque publique d'investissement, nous paraissent aller plutôt dans le bon sens. Il est bon que l'État, mais aussi les collectivités locales, dans le respect des négociations de branche, réunissent l'ensemble des acteurs d'une filière donnée pour réfléchir collectivement aux moyens de s'attaquer à tout ce qui freine le développement, la recherche ou l'innovation.
On a évoqué la thématique de l'énergie : nous considérons que l'indépendance énergétique et la relative faiblesse des coûts de l'énergie en France sont des atouts de compétitivité pour l'industrie française. Une politique publique favorisant le renforcement des filières énergétiques permettra à nos entreprises de se développer, y compris à l'exportation, pourvu qu'elle soit pérenne. A contrario l'instabilité des mesures d'incitation fiscale favorables au développement des énergies nouvelles a eu des effets catastrophiques sur l'activité et les emplois.
Nous ne sommes pas opposés au principe même de la BPI – nous étions favorables au regroupement d'Oséo, du Fonds stratégique d'investissement (FSI), de CDC Entreprises – ou du CICE, pourvu que l'octroi des aides publiques soit lié au maintien et au développement de l'emploi ou à l'investissement dans la recherche.
Nous préférons que la puissance publique intervienne, dans la concertation et le dialogue, pour donner du sens et de la lisibilité aux entreprises, aux secteurs et aux filières, plutôt qu'elle utilise le terme de compétitivité pour justifier la modération salariale, remettre en cause le financement de la protection sociale ou réduire les services publics.