Nous vous répondrons par écrit sur certains points, comme la formation professionnelle – qui accuse un décalage problématique entre la masse financière mise en oeuvre et l'efficacité des dispositifs, avec un taux d'évaporation important.
L'accord sur la compétitivité et l'emploi sécurise pour les salariés des accords qui existaient déjà. L'exemple de l'usine Continental de Clairoix est très éclairant à ce propos. L'employeur, dont l'actionnariat est allemand, propose de consolider le site et s'engage à investir pendant dix ans, moyennant la négociation d'un passage à 39 heures de travail hebdomadaire et du recours à des intérimaires. Un an plus tard, l'accord conclu en ce sens est remis en cause, car des changements intervenus du côté de l'actionnaire allemand. Un tel revirement n'aurait pas été possible en Allemagne, où le patronat n'aurait jamais trahi ses engagements vis-à-vis des syndicats allemands – mais il n'a pas hésité à le faire vis-à-vis de ses salariés français. Nous avons alors assisté à une démission totale du politique mais aussi du MEDEF, qui n'ont jamais déclaré qu'il était inacceptable de ne pas respecter un accord. Cette situation ne pourra pas se reproduire après l'entrée en vigueur de l'accord sur la compétitivité et l'emploi, dont l'annexe précise, dans son article 10, que le non-respect par l'employeur de ses obligations l'expose à une sanction pénale dont le principe doit figurer dans l'accord et que le juge même ne peut pas réduire. Ce dispositif apporte de la sécurité à une souplesse qui peut se révéler nécessaire lorsqu'un effort peut permettre à une entreprise de surmonter une période de difficultés.
Comme d'autres organisations, nous préférons un accord négocié et validé par une majorité, plutôt que d'envoyer des salariés directement au chômage. La méthode est bonne : la nécessité d'une majorité dans l'entreprise garantit l'acceptation par les salariés de l'effort qui permet d'éviter le chômage. Cette sécurisation des salariés est un progrès.
Pour ce qui concerne les baisses de rémunération, l'accord exclut de toucher au salaire minimum, et même aux salaires inférieurs à 1,2 SMIC. Cependant, comme l'indique une annexe de l'accord, la négociation n'est pas achevée : il est plus difficile de toucher aux salaires qu'au temps de travail, car les salariés établissent leur budget en fonction de leur salaire et, même avec un salaire du double ou triple du salaire minimum, on peut se trouver dans le rouge à la fin du mois. La discussion doit se poursuivre et il s'agit de diminuer non pas les salaires nets, mais le coût du travail pendant un ou deux ans, le temps de traverser une passe difficile. Autrement dit, il faudrait de réduire temporairement les prélèvements sociaux, ce qui se traduirait pas une créance que détiendrait l'URSSAF sur l'entreprise. J'ai évoqué cette proposition, qui émane de la CFTC, avec les représentants des organisations patronales et avec le cabinet du ministre. Il faudra bien évidemment se garder d' « ouvrir les vannes » sans cadrer soigneusement un tel dispositif.
Ces exemples montrent que, s'il nous faudra faire vivre l'accord qui vient d'être conclu, celui-ci est déjà une bonne avancée, qui sécurise les salariés et les entreprises.
Les salariés seraient en droit, dans le cadre d'un accord de ce type, de refuser une baisse de rémunération, mais il faudra éviter les effets d'opportunité qui pourraient conduire certains salariés très bien rémunérés à profiter des difficultés rencontrées par l'entreprise pour recevoir, après leur refus, d'importantes indemnités de départ. L'article 5 de l'annexe de l'accord prévoit cependant clairement que les négociations doivent prendre en compte les contraintes d'ordre privé que peuvent supporter les salariés : il reviendra aux salariés de l'entreprise, qui connaissent la réalité de ce que vivent leurs collègues, d'affiner les cas où des contraintes familiales excluraient certains d'entre eux du bénéfice de l'accord. Ce dernier est donc assez pragmatique pour permettre une approche cas par cas.
Les entreprises doivent retrouver des marges suffisantes et le crédit d'impôt doit leur apporter un ballon d'oxygène, pourvu qu'il soit utilisé à juste titre pour développer l'excellence des produits, la recherche et l'innovation, ainsi que la meilleure organisation du travail. Dans les pays nordiques ou en Allemagne, le service après-vente est bien plus efficace qu'en France. L'effondrement des exportations françaises que nous observons alors que le reste de l'Europe exporte tient à un déficit non seulement de la qualité des produits, mais aussi des services. Ainsi, les machines qu'utilise l'entreprise Chèque Déjeuner pour imprimer ses nombreux chèques, sont importées d'Allemagne et coûtent chacune 300 000 euros, soit bien plus que les machines asiatiques qu'elle pourrait également utiliser, car le service assuré par des techniciens et la disponibilité de pièces détachées de qualité rendent ces équipements beaucoup plus fiables et plus sûrs. À nous de travailler pour que nos entreprises soient elles aussi parmi les plus fiables, ce qui suppose qu'elles puissent améliorer leurs marges, aujourd'hui trop faibles.