Intervention de Carlos Da Silva

Séance en hémicycle du 16 février 2016 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCarlos Da Silva :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous avons parfois entendu dans cet hémicycle et sur certains plateaux de télévision que la prorogation de l’état d’urgence pourrait instaurer un régime d’exception menaçant tout à la fois nos libertés individuelles, le droit à la vie privée et familiale, le droit d’aller et venir, les libertés d’expression et de manifestation, et qu’elle nous exposerait à l’arbitraire des forces de sécurité. Nous avons aussi entendu que l’état d’urgence était inefficace, inutile, inadapté ou, pour être plus exact, superfétatoire.

Tout d’abord, je me félicite que notre assemblée puisse avoir ce débat sereinement, trois mois et trois jours exactement après les événements qui ont bouleversé le pays et le monde entier, le 13 novembre dernier. Je crois en effet que ce projet de loi ne souffre aucune approximation, aucune posture, aucune idéologie.

La vérité, c’est que notre pays est confronté à un nouveau type de menace – une menace diffuse que, jamais dans son histoire, il n’avait connue – et que, si nous devons continuer de vivre, de sortir, de penser et d’aimer comme avant, nous ne pouvons pas faire comme si rien n’avait changé.

L’état d’urgence est, par essence, un état intermédiaire, dont il faut être capable de sortir, mais il serait irresponsable de le faire dans la précipitation, sans être parfaitement sûrs que tous les moyens matériels et humains mobilisés puissent assurer durablement la sécurité de nos concitoyens. C’est tout le sens des nombreux renforcements de nos moyens de protection adoptés dès 2012 et qui vont être prolongés par le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé et son financement, ainsi que l’efficacité et les garanties de la procédure pénale.

Comme l’ont rappelé le ministre de l’intérieur et Pascal Popelin dans son rapport, ce n’est pas la menace terroriste qui fait l’état d’urgence, mais le péril constamment imminent. Comment ne pas le reconnaître, quand on sait que des projets d’attentats ont été déjoués grâce au travail méticuleux des services de renseignement, de police et de justice et à une coopération renforcée entre eux ?

Rappelons-nous ce moment de concorde, à Versailles, devant le Président de la République et sous le regard des Françaises et des Français. Rappelons-nous ce vote quasi unanime, ici même, le 19 novembre dernier, lorsqu’il s’est agi de prolonger une première fois l’état d’urgence. Rappelons-nous ces images, auxquelles nous n’étions pas habitués, de ces hommes et de ces femmes, membres des forces de police et de gendarmerie, militaires, sauveteurs, acclamés par tout un peuple qui reste debout. Face à la menace terroriste, nous devons être forts. L’action publique, ce sont des décisions fortes et des résultats.

Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, ainsi que l’ensemble des services départementaux grâce auxquels nous disposons d’un suivi et d’un bilan précis des mesures déployées : 3 340 perquisitions administratives ont ainsi été réalisées, qui ont donné lieu à 395 interpellations, entraînant 344 gardes à vue et conduisant à 67 condamnations, avec 580 armes neutralisées, parmi lesquelles 42 armes de guerre. Qui peut prétendre sérieusement que ces mesures ont été inutiles ? Qui peut regretter que ces armes, les mêmes que celles qui ont été utilisées par les terroristes, aient été retirées de la circulation ?

Quant au nombre de cas litigieux, la vérité nous oblige, là aussi, à l’exactitude : leur nombre est extrêmement faible et, parce que chaque cas mérite d’être examiné avec la plus grande attention et la plus grande impartialité, les juges administratifs disposent de toute latitude pour établir les éventuels manquements, que nous ne saurions en aucun cas tolérer.

En mars, la commission des lois rendra un rapport d’étape sur le suivi de l’état d’urgence – un travail nécessaire, initié par Jean-Jacques Urvoas, qui est exigeant, intransigeant, viscéralement attaché à la justice et à la liberté, comme l’est Dominique Raimbourg, et qui assure un contrôle effectif, permanent et librement consultable de l’action du Gouvernement.

Bref, nous avons su nous dépasser et dépasser des enjeux dérisoires pour nous retrouver sur l’essentiel. Je ne doute pas que ce soir, il en ira de même sur ce texte, dans l’intérêt de os concitoyens.

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