Intervention de Jean-Marc Germain

Réunion du 4 février 2016 à 9h00
Mission d'information relative au paritarisme

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marc Germain, rapporteur :

Merci pour cet exposé introductif.

Notre mission portant sur le paritarisme, au fond, nous entrons dans le sujet par un thème tiré de la vieille économie, si j'ose dire ; mais ces nouvelles formes, ces modes de production, cette sorte de révolution industrielle des services, qui concernent aussi un peu l'industrie, réinterrogent toute la protection sociale. Ni le président Arnaud Richard ni moi-même, pas plus que de nombreux collègues, ne sommes des pessimistes. Il s'agit pour nous de voir ce qui peut créer des opportunités dans le monde de l'économie et de la consommation, mais aussi dans le monde politique, syndical, associatif. Cela peut créer des difficultés, mais aussi des opportunités. Comment faire que la balance penche du bon côté ? Comment faire pour que ce modèle soit émancipateur et non contraignant, réducteur ou précarisant ?

Sans doute un certain nombre de choses se jouent-elles au niveau de la concurrence. Si, dans un domaine, une seule plateforme écrase toutes les autres, le jour où vous perdez une étoile dans votre évaluation sur celle-ci, vous perdez la moitié de vos revenus ; avec deux étoiles en moins, vous en perdez les trois quarts. Dans un premier temps, vous compenserez en travaillant soixante-douze ou quatre-vingt-dix heures par semaine, et puis vous vous retrouvez exclu du secteur sans que les règles qui président à ces notations ne soient contrôlables. Voyez Google : comment fait-on pour apparaître en tête des résultats de recherche ? Personne ne sait, sauf celui qui est derrière le logiciel. Or tout le modèle économique de Google est fondé là-dessus : on vous y conduit sur une autoroute bordée de panneaux publicitaires. Faut-il laisser cette économie se développer et créer ses propres régulations ? C'est notre interrogation.

Et si oui, comment ? Nous recevions ce matin des organisations syndicales et patronales, et ni les unes ni les autres, dans leurs statuts, n'ont juridiquement les moyens d'accueillir de tels adhérents. Du coup, elles ont beaucoup de mal à construire des régulations : autoriser AirBnb pour quatre mois, pas plus, soit, mais qui fixe cette norme ? Pour entrer dans une logique de régulation, il faut des acteurs légitimes capables de les construire. Autant nous nous sentons fondés, en tant que parlementaires, à définir des principes généraux, autant nous avons besoin d'acteurs pour créer cette frontière qui sépare les opportunités des difficultés, qui permettent la création du nouveau en évitant la déstabilisation. Comment voyez-vous, pour votre part, la construction de ces nouvelles règles ?

Ensuite, il faut créer des règles de protection, des droits à l'erreur, si je puis dire : si cela tourne mal, que se passe-t-il en termes de revenus de remplacement, de retraite, d'assurance-maladie ? Faut-il inventer un tiers-secteur ? On pourrait imaginer prélever un euro par nuitée réservée sur la plateforme AirBnb, avec l'idée que ce type de structure retombera dans le lit de l'entreprise ou du salariat à la faveur d'une amélioration de la situation économique ou d'une évolution de la concurrence. L'une de nos inquiétudes est que si nous créons un contrat de travail de catégorie B, offrant une protection réduite, des secteurs d'activité qui pourraient très bien respecter des normes sociales plus élevées ne finissent, en raison de la concurrence, par suivre cette pente.

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