Intervention de Franck Reynier

Séance en hémicycle du 23 janvier 2013 à 15h00
Situation de la sidérurgie française et européenne dans la crise économique et financière — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFranck Reynier :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, l'arrêt prolongé des lignes de production de Florange a provoqué un choc dans la région et, au-delà, dans l'ensemble de notre pays. Les derniers hauts-fourneaux lorrains à l'arrêt représentent, aujourd'hui, le triste étendard d'une sidérurgie en perte de vitesse sur le territoire national. Avec eux, c'est une partie de notre histoire industrielle qui s'éteint avec, en toile de fond, des centaines d'hommes et de femmes qui sont confrontés à un véritable drame social.

Le contexte international explique en partie ce phénomène : la crise économique et financière de 2008 a provoqué une chute particulièrement marquée du marché de l'acier en Europe, qui a atteint 50 % en France. En dépit d'une embellie temporaire, un nouveau repli de la consommation s'est amorcé depuis 2011. Des surcapacités substantielles de production en Europe, déjà résorbées dans les années 1980, se font à nouveau jour de façon probablement durable, selon l'ensemble des projections recensées aujourd'hui. Les chiffres de l'emploi et de la production de la filière sont en diminution depuis les grandes restructurations des années 1970. Parallèlement, la part de la sidérurgie française dans la production mondiale ne cesse de reculer : notre pays, qui ne compte plus que pour 1 % dans la production mondiale d'acier, est passé en vingt ans du neuvième au quinzième rang mondial. Si la filière ne représente que 1,9 % de l'emploi industriel, de récentes études montrent que son poids réel dans l'économie de notre pays représente bien davantage à travers les interconnexions qu'elle établit avec le développement des autres activités industrielles, comme la métallurgie, les fabricants de biens d'équipement ou encore l'industrie du bâtiment.

Dans ce contexte, notre rôle est de nous pencher sur les origines de la perte de vitesse de notre industrie sidérurgique, d'analyser les raisons qui expliquent que la perte de parts de marché de la France – 27 % – se soit faite au profit de l'Allemagne, de l'Espagne ou de l'Italie. Cela implique d'avoir une vision globale et à long terme de la situation de la sidérurgie en France et en Europe, puisque celle-ci a été au coeur de la naissance du projet européen. À travers ces questions, c'est celle de notre indépendance industrielle qui nous est directement posée. Nous devons parvenir à anticiper les mutations du secteur dans le but d'apporter des solutions pragmatiques aux 75 000 salariés qui travaillent encore dans l'industrie sidérurgique française.

La création de cette commission d'enquête doit aussi permettre de faire toute la lumière sur le dossier de Florange et sur les atermoiements de l'exécutif au sujet de la reprise éventuelle du site.

Quels événements ont bien pu conduire M. le ministre du redressement productif à affirmer qu'un aciériste était prêt à investir 400 millions d'euros pour la totalité du site, brandissant alors d'une main menaçante le spectre de la nationalisation en cas de refus d'ArcelorMittal, avant d'être recadré, deux jours plus tard, par le Premier ministre qui ne retenait finalement aucune des options triomphalement présentées par son ministre ? Dans ce contexte de drame social, de telles attitudes ajoutent de la désespérance au désespoir.

La commission d'enquête devra également se pencher sur l'accord intervenu entre Mittal et le Gouvernement, sur la réalité des investissements qui seront véritablement engagés et sur la diversification et la pérennisation des activités sur ces sites.

Le groupe UDI, s'il ne partage pas la virulence de l'exposé des motifs de la résolution, qui désigne des responsables tout trouvés de la situation du marché de la sidérurgie, apportera naturellement son soutien à la création de cette commission d'enquête.

Le fait que l'on inscrive ses futurs travaux dans le cadre européen et que l'on élargisse son champ à la métallurgie nous renforce dans notre soutien.

Ce soutien se veut lucide et constructif, car nous souhaitons avant tout que la future commission ne se cantonne pas à établir un état des lieux. De nombreux experts s'accordent à dire que seule l'innovation peut sauver la filière.

L'essentiel de notre travail devra donc se focaliser sur nos potentialités technologiques, celles qui nous donneront un temps d'avance dans la concurrence avec les pays émergents et permettront de pérenniser notre industrie sidérurgique en apportant un espoir aux salariés concernés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion