Intervention de Bernard Cazeneuve

Séance en hémicycle du 23 janvier 2013 à 15h00
Débat sur les politiques industrielle et commerciale européennes

Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé des affaires européennes :

Monsieur de Rugy, lorsque vous évoquez les raisons qui vous poussent à sauter sur votre chaise, je n'en vois aucune qui justifierait une condamnation de notre action au sein de l'Union européenne. Je n'ai aucune raison de m'indigner de ce que vous venez de dire et vous n'avez aucune raison de sauter sur votre chaise lorsque nous exprimons ce que nous avons à exprimer.

Pourquoi ? Parce qu'il n'y a pas un État au monde qui préconise le protectionnisme aujourd'hui ; parce qu'il n'y a pas un entrepreneur, fût-il adepte du commerce équitable, qui réclame la fermeture de toutes les frontières. Nous avons besoin de vendre et d'acheter : les industriels mourraient s'ils n'avaient pas la possibilité d'acheter des matières premières et des composants produits hors de nos frontières pour pouvoir eux-mêmes produire.

La question du protectionnisme et du libre-échange ne se pose pas de façon aussi théologique qu'au XIXe siècle. Nous avons besoin d'acheter et de vendre, je le répète, et la question est de savoir quelles règles élaborer au sein de l'Union européenne pour faire en sorte que l'Europe ne se désindustrialise pas massivement, ne perde pas d'emplois et que la préoccupation que votre groupe exprime souvent pour les conditions sociales et environnementales soit prise en compte.

Telle est notre préoccupation lorsque nous demandons que puissent être rejetées les offres anormalement basses soumises pour un marché public par les pays qui ne respectent pas nos clauses sociales et environnementales.

Je préfère voir l'Europe avancer dans cette voie – lorsqu'elle modifie ses directives, lorsqu'elle prend en compte nos préoccupations en matière de régulation du commerce international – plutôt que de déclarer de façon idéologique un grand soir européen qui va produire des antagonismes, affaiblir notre position au sein de l'Union européenne et nous conduire à ne plus rien obtenir de ce que nous souhaitons voir prévaloir.

Je n'ai pas de désaccord de fond avec vous, Mme Bricq non plus, je crois. Je ne suis même pas sûr que nous ayons un désaccord de méthode parce que je suis absolument convaincu que vous vous rallierez assez facilement à l'idée que l'on ne pourrait plus obtenir de l'Union européenne ce que nous souhaitons si nous créions des conditions politiques telles qu'elle se ferme totalement à nos demandes. Nous ne pouvons pas non plus, lorsque nous commençons à obtenir ce que nous souhaitons, ne pas vouloir aller plus loin en continuant à discuter, à dialoguer et à porter notre parole.

Mme Bricq l'a dit tout à l'heure avec raison, lorsque nous sommes autour de la table des Vingt-sept, des pays comme le Danemark ou la Suède n'ont pas nécessairement la même approche que nous du juste échange. Mais malgré cela, nous parvenons à faire avancer nos thèses. Nous proposons donc très pragmatiquement que nous nous adossions à ce que nous avons déjà engrangé pour aller plus loin.

Quand je vous dis qu'il ne me paraît pas souhaitable de remettre en cause les institutions et les politiques européennes de façon unilatérale et déclaratoire, c'est parce que j'ai pu constater, notamment au cours des derniers mois, qu'il est possible au sein de l'Union d'avancer très concrètement dans le sens de ce qui nous paraît souhaitable afin que le juste échange, le mieux-disant social, le mieux-disant environnemental et l'harmonisation fiscale progressent. Telle est notre politique.

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