Intervention de Brigitte Allain

Réunion du 16 février 2016 à 21h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Allain :

Ma permanence, celle d'une députée du groupe Écologiste, est l'une de celle devant lesquelles du fumier a été épandu. Ni l'utilisation croissante de pesticides, ni ces déversements de fumier ne changeront le fait que la politique agricole commune est devenue incohérente : elle n'est plus justifiée pour les consommateurs et elle ne satisfait pas les agriculteurs. Tout cela provient du démantèlement, à l'oeuvre depuis trente ans, des outils de maîtrise de la production ; nous sommes arrivés au terme du processus. Il est utile de rappeler que les libéraux, majoritaires en Europe aujourd'hui, ont toujours défendu la thèse selon laquelle la régulation se ferait par les prix. On voit ce qu'il en est : les prix ne cessent de baisser et l'on va dans le mur. Il en résultera que l'on va fermer les élevages et arrêter la production de lait, et que l'on sera contraint de donner des aides pour cessation d'activité. Voilà ce à quoi a conduit la politique de dérégulation menée depuis trente ans.

Tous les soutiens à l'agriculture doivent être réorientés vers les productions de qualité qui ont un marché, intérieur et international. Ainsi assurera-t-on un bon niveau de vie aux agriculteurs. Dans ce contexte, le décret relatif à l'indication de l'origine du lait et des viandes peut être immédiatement utile, à condition qu'y soit spécifiés les modes de production visés, et que référence soit donc faite à la qualité. L'Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev), qui s'oppose au projet de traité de libre-échange transatlantique, s'appuie pour cela sur la distinction entre les viandes françaises de qualité et celles qui sont issues des fermes-usines américaines. Si nous continuons une production de viande et de lait reposant sur des importations de maïs et de soja, si nous persistons à dire qu'il faut toujours davantage de pesticides et si nous laissons s'installer des fermes-usines en France, comment pourrons-nous nous opposer, demain, au traité transatlantique ? Comment pourrons-nous nous opposer aux importations de viandes américaines qui viendront concurrencer les viandes de qualité produites dans des élevages en agroécologie, ces élevages qu'il faut accompagner dans les meilleurs délais ?

Les sommes consacrées au soutien des agriculteurs doivent être conditionnées à un changement du système de production, sinon elles seront sans utilité et il faudra remettre au pot tous les six mois. Pour fermer ce puits sans fond, il est temps de passer d'une politique agricole à une politique alimentaire.

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