Pourtant, l’objet de l’article 1er de la proposition de loi que j’avais défendue au nom du groupe était précisément d’élargir les conditions de l’irresponsabilité dont devaient bénéficier ceux qui avaient, en vertu de la loi, l’usage de la force armée, le « monopole de la violence légitime », selon l’expression de Max Weber. Vous n’y avez pas répondu ou ne l’avez fait que très partiellement.
Deuxième exemple, devant le constat des limites techniques que rencontrent les services chargés des enquêtes en matière de terrorisme, vous passez complètement à côté des enjeux liés à la modernisation des technologies d’investigation. Pourtant, nous le savons, et vous me permettrez de m’attarder quelques instants sur ce sujet extrêmement important, les téléphones mobiles et le réseau internet sont devenus des vecteurs quasiment systématiques tant pour le recrutement des terroristes que pour la préparation des actes de terrorisme. Ils sont désormais des éléments déterminants dans toute enquête pénale en lien avec le terrorisme ou la criminalité organisée. À ce titre, les fabricants et opérateurs de télécommunications, les fournisseurs d’accès à internet et plus globalement les prestataires de services sur internet peuvent disposer d’informations essentielles pour la résolution des enquêtes relatives aux infractions terroristes.
Aux États-Unis, ce débat est au coeur de l’actualité après la tuerie de San Bernardino. Le conflit qui oppose le FBI et Apple est un puissant révélateur des obstacles technologiques sur lesquels buttent les enquêtes pénales. En effet, les services d’investigation sont régulièrement dans l’incapacité d’accéder aux informations contenues dans certains téléphones, qui sont devenus illisibles lorsqu’on ne dispose pas du code de déverrouillage ou de déchiffrement des données. L’amiral Michael Rogers, qui dirige la NSA – l’Agence nationale de la sécurité –, affirmait voilà quelques jours dans une interview au magazine de Yahoo que sans le chiffrement, les attentats de Paris auraient pu être évités. Le procureur Molins a quant à lui signé voilà quelques semaines avec tous les procureurs antiterroristes des grands États démocratiques une tribune soulignant que la justice était devenue aveugle.
Face à ces hyperpuissances, qui sont avant tout financières, et qui considèrent que leurs règles, leurs codes sont supérieurs à ceux des États de droit, que leurs lois sont supérieures aux lois des États démocratiques, nous devons profiter de ce débat pour rendre à la justice cette indispensable vision protectrice.