La réponse à votre première question est oui. Il existe une rétroaction. En règle générale, l'État, contrairement à l'ANR, ne participe pas aux travaux des jurys, et cela me semble sain, pour que le jury se sente à l'aise. Quand nous revenons vers le comité de pilotage, nous sommes accompagnés du président du jury, qui présente la façon dont s'est déroulée l'évaluation, ainsi que la qualité des projets présentés, et qui fait par la même occasion un retour sur le cahier des charges lui-même, en indiquant par exemple que tel point n'a pas été bien compris ou bien traité, ou en décrivant la réponse des communautés aux différents items. C'est un bilan de l'appel à projets, et il est pris en considération.
Sur les quarante appels à projets, les avis des jurys ont toujours été suivis, même si, pourles IDEX, ils ont été assez difficiles à recevoir, pour certains, ce dont la presse s'est fait l'écho. Jusqu'à présent, l'État, et j'en sais gré au CGI, a toujours considéré qu'il était très important de respecter les jurys et l'évaluation par les pairs. Tout ce que les jurys ont demandé à financer l'a été, quand bien même des coups de rabot ont parfois été demandés. Cela dit, il a pu aussi arriver que l'État aille chercher un peu plus loin dans la liste. Quand le jury présentait une liste dont les trois premiers projets étaient considérés comme excellents et les suivants comme moyens, l'État a pu décider de retenir également des projets jugés moyens, quitte à mieux les suivre ou à les reformater légèrement, et ce pour des raisons stratégiques.
Les règles du jeu ont toujours été bien expliquées aux jurys. Certaines réunions de comités de pilotage, avec des présidents de jury, ont été un peu houleuses : des ministères ont pu s'étonner que certains projets soient jugés très bons ou à l'inverse que d'autres n'aient pas été retenus, mais cela donne lieu à des explications et, in fine, il est tenu compte de l'avis du jury.
Une fois prise la décision du Premier ministre, qui explique comment le projet doit être financé et sur quelle durée, notre travail consiste à contractualiser, à décaisser et à assurer le suivi du projet. Il s'agit, dans un premier temps, d'un suivi courant, à savoir d'un reporting annuel, scientifique et financier, des 480 projets, sur la base d'indicateurs. Nous sommes attachés à l'organisation d'au moins un rendez-vous par an sur chaque projet. Cela nous permet de faire un rapport au CGI et aux ministères.
En plus du suivi courant, nous avons régulièrement des points d'étape, ce qui est une particularité du PIA. Pour des projets de trois ou quatre ans, de tels jalons ne sont pas nécessaires, mais ils le deviennent pour des projets à dix ans, en particulier sur les aspects de valorisation où l'on quitte le domaine de la recherche fondamentale classique pour l'innovation et des produits plus proches du marché. Pour les IDEX, nous parlons, pour ces jalons, de fin de période probatoire. Le fonctionnement de ces points d'étape est un peu à la carte, en fonction notamment des demandes des ministères et du CGI. Nous faisons en règle générale revenir des membres du jury et, en ce qui concerne les aspects de valorisation, nous travaillons avec les autres opérateurs, les cellules de suivi des ministères, ainsi que des cabinets de consultants. Nous avons réalisé l'été dernier le point d'étape pour les 171 LABEX, après trois ans de fonctionnement, en faisant venir quatre-vingts membres de jury.
Sur les actions de recherche en amont, il s'agit de détecter les projets en difficulté, et nous demandons éventuellement aux équipes de mettre en place des plans d'ajustement. Dans la recherche, il n'y a pas d'obligation de résultat ; si l'on est sûr de trouver, cela ne s'appelle plus de la recherche mais du développement. Nous comprenons, à l'ANR, du fait de nos profils – j'ai moi-même été chercheur –, cette problématique. Sur un IDEX ou des projets de valorisation, en revanche, il y a aussi une obligation de résultats, car il ne s'agit pas que de recherche : avec la création d'un socle de connaissances qui doit générer de la propriété intellectuelle et de la valorisation, on quitte le domaine exclusif la recherche et il faut des résultats.