Intervention de Yann Galut

Séance en hémicycle du 3 mars 2016 à 15h00
Lutte contre le crime organisé le terrorisme et leur financement — Article 16

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYann Galut, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire :

À titre liminaire, je me félicite de l’avancée que représente l’article 16. Il transpose en effet dans ce projet de loi un mécanisme qui existe d’ores et déjà pour le délit général de blanchiment, prévu par le code pénal, en procédant à un renversement de la charge de la preuve. En tant que rapporteur au fond de la loi relative à la lutte fraude fiscale du 6 décembre 2013, j’avais défendu, avec mon collègue Yves Goasdoué, ici présent, un amendement dont l’adoption a permis d’introduire ce mécanisme dans la loi.

Le blanchiment sous toutes ses formes est un point d’entrée incontournable du financement de la grande criminalité et du terrorisme. Il était donc important de l’étendre au blanchiment douanier afin de renforcer l’effectivité et la souplesse des moyens d’action de la douane en ce domaine. En tant que rapporteur pour avis, j’ai souhaité aller plus loin, et réfléchir plus largement au rôle qui doit être dévolu à la douane aujourd’hui, puisqu’il est démontré que les transferts financiers, notamment ceux qui alimentent le terrorisme, s’effectuent en grande majorité sous forme d’argent liquide et revêtent un caractère transfrontalier.

C’est pourquoi j’ai déposé plusieurs amendements visant à étendre le champ de compétences des services douaniers à l’infraction pénale relative au financement du terrorisme, par exemple en incluant les infractions sous-jacentes au blanchiment douanier, en cohérence totale avec l’esprit du texte que nous discutons.

L’Europe et la mondialisation ont fait tomber les frontières. Simultanément, le terrorisme s’est internationalisé. En temps voulu, face au développement international du trafic de stupéfiants, le législateur n’a pas hésité à engager pleinement les douanes dans cette lutte. Il ne faut pas hésiter, aujourd’hui, à faire de même pour le financement du terrorisme, au minimum en renforçant la compétence du service national de douane judiciaire.

J’ai conscience du caractère sensible de cette proposition, notamment au regard du partage de pouvoirs avec la police judiciaire que cela représente. Il serait néanmoins dommage d’écarter d’office cette piste de réflexion, cette idée d’évolution, au motif qu’il serait difficile de décloisonner les compétences sur des sujets qui relèvent de la sécurité nationale et internationale – auxquels je sais, monsieur le ministre, que vous êtes sensible.

Dans la même logique, je souhaite ouvrir le débat au sujet de l’obligation de déclaration pour les transferts transfrontaliers d’argent liquide, tant pour ce qui concerne le seuil de ces transferts que pour la nature des justifications de la provenance des fonds. Je considère en outre que les sanctions réprimant les manquements à cette obligation sont insuffisamment dissuasives.

Par les amendements que j’ai déposés, je reste attentif au principe de proportionnalité et à la faisabilité pratique des mesures que je propose. Je rappelle que mon premier objectif est de susciter le débat sur ces sujets, de proposer des pistes de réflexion. Puisqu’il est urgent d’adopter ce texte, il ne sera pas possible de faire aboutir dès à présent l’ensemble des évolutions que je souhaite. Je souhaite cependant que le Gouvernement se saisisse de certains de ces sujets – auxquels je vous sais sensible, je le répète, monsieur le ministre.

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