Monsieur le ministre, madame la rapporteure, je trouve votre position très dure ! Enfin, de quoi est-il question ? De personnes condamnées à la suite d’aveux obtenus sous la torture ! Vous rendez-vous compte de ce que cela signifie ?
Votre position légitime tout bonnement le fait que des aveux aient été obtenus sous la torture, quitte à examiner si le doute pesant sur ces aveux est suffisamment important ou pas. Eh bien moi, je ne m’y résous pas. J’estime que des aveux obtenus sous la torture ne sont pas des aveux. J’estime que les éléments obtenus par la violence, les brutalités, la torture, en un mot par des traitements inhumains ou dégradants – formulation que j’ai volontairement reprise de l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme – sont des pièces nulles et qu’elles ne doivent pas pouvoir être utilement invoquées.
Je ne demande pas, naturellement, que l’on rejuge telle ou telle affaire. Mes amendements s’appuient sur des faits passés, mais dans le but d’imposer, pour l’avenir, la nullité des aveux obtenus sous la torture. Par ces amendements, je demande simplement qu’un éventuel nouveau procès puisse avoir lieu. C’est ce qui se fera dans l’affaire Seznec – que vous connaissez mieux que quiconque, monsieur le président, avec Mme Lebranchu, qui s’est tant battue pour cela.
Vous savez que dans l’affaire Seznec, il y a eu une torture de l’instruction, ce qui est un autre problème. Des gens ont ensuite été fusillés à la Libération pour avoir commis les crimes les plus atroces possibles.
En l’occurrence, il ne s’agit pas de l’affaire Mis et Thiennot, il s’agit de savoir si, oui ou non, nous considérons que des pièces obtenues sous la torture sont valides, sont susceptibles d’entraîner la conviction des jurés, et peuvent ainsi justifier la condamnation d’individus. Je ne l’accepterai jamais.