Intervention de Mathieu Hanotin

Séance en hémicycle du 24 janvier 2013 à 15h00
Débat sur la politique de l'hébergement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathieu Hanotin :

Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je souhaite profiter des débats organisés dans le cadre de la semaine de contrôle de notre assemblée pour évoquer la question de l'hébergement, au-delà même de l'excellent rapport rédigé par nos deux collègues.

Les chiffres montrent, s'il en est besoin, l'importance du problème – 80 000 places d'hébergement pour environ 150 000 personnes sans domicile –, un problème dont la nature est double. D'une part, il faut trouver des solutions pérennes pour l'avenir, ce qui renvoie à la politique de construction de logements ; d'autre part, au dernier maillon de la chaîne, comme le disait Annick Lepetit, c'est la question de l'hébergement d'urgence qui se pose, avec celle de la mise en oeuvre de la solidarité nationale, ayant vocation à venir en aide aux personnes ayant été victimes d'un accident de la vie.

Je centrerai mon propos sur l'année 2013 et l'urgence qu'il y a à agir dès maintenant, sans attendre les constructions destinées à rattraper le retard que nous avons pris et dont, en tout état de cause, la réalisation prendra mécaniquement plusieurs années – car construire 1 000 places d'urgence prend forcément du temps. La situation actuelle est celle de squats mettant en danger leurs occupants. Je rappelle que des incendies survenus dans des immeubles vétustes ont récemment causé le décès de plusieurs personnes dans le département de Seine-Saint-Denis, dans ma ville de Saint-Denis, mais aussi à Pantin, où des immigrés tunisiens, réfugiés en France à la suite des événements qui ont secoué leur pays, ont malheureusement trouvé la mort.

Durant l'hiver 1954, l'Abbé Pierre s'insurgeait du fait que les animaux soient parfois mieux traités que les hommes, abandonnés à leur propre sort dans la rue. Si nous n'en sommes plus là, force est de constater que nous n'en sommes tout de même pas loin, avec le retour des bidonvilles en région parisienne. Ces bidonvilles n'ont d'ailleurs plus rien d'exceptionnel : il s'agit désormais d'un phénomène de masse, contre lequel il faut trouver des solutions d'urgence.

Je veux donc soumettre une idée à votre réflexion, madame la ministre : nous devrions nous inspirer de la loi SRU, qui a fixé un taux de 25 % de logements sociaux, pour faire également progresser la situation en matière d'hébergement en mettant en oeuvre une politique de quotas de places d'accueil, ville par ville. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, nous pourrions commencer en fixant un quota d'une place pour mille habitants – ce qui représenterait, à l'échelle de la région parisienne, un doublement des capacités d'accueil par rapport à la situation actuelle –, tout en essayant de cibler les différentes catégories d'hébergement.

Pour agir dès maintenant, nous devons avoir le courage de réquisitionner, s'il le faut, un certain nombre de terrains. Nous devons également mettre en place des hébergements mobiles : certes, cette solution n'est pas idéale, notamment en raison des risques qu'elle comporte, mais rien n'est pire que la situation que nous connaissons aujourd'hui. Si nous voulons agir rapidement, dès 2013 nous devons donc en passer par là, quitte à ce que cela constitue un constat d'échec des politiques mises en oeuvre au cours des années précédentes. Il suffit, pour se rendre compte de la gravité et de l'urgence de la situation, d'emprunter l'autoroute A1 et de circuler à proximité du Stade de France, où plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de personnes vivent entassées sous les ponts d'autoroute et les quelques bouts de terrain qu'elles ont pu trouver.

Cette situation est insupportable pour la République, et nous devons absolument trouver une solution pour y remédier – une solution qui, je le répète, ne peut se limiter à l'échelon local et reposer uniquement sur les collectivités locales, qui n'ont pas la capacité d'assumer seules le dilemme auquel elles doivent faire face : soit laisser perdurer des situations inacceptables, tant pour les communes concernées que pour les personnes trouvant refuge dans les bidonvilles, soit se résoudre à expulser les sans-abri – c'est-à-dire à les repousser un peu plus loin. Face à de telles situations, l'État doit absolument intervenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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