Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le débat qui nous réunit aujourd'hui et qui porte sur les suites du rapport relatif à la politique de l'hébergement d'urgence présenté au nom du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques a lieu en pleine mise en oeuvre du plan hivernal, quelques jours après l'adoption par le Comité interministériel de lutte contre les exclusions – il ne s'était pas réuni depuis 2006 – d'un plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion et quelques semaines après les annonces du Gouvernement en matière d'hébergement d'urgence.
Dans le contexte d'une crise du logement qui s'aggrave chaque jour un peu plus, 8 millions de personnes sont en situation de fragilité – copropriétés dégradées, loyers impayés, surpeuplement, surendettement –, plus de 3 millions de personnes sont très mal logées et 150 000 personnes sont sans domicile fixe.
Or chacun sait qu'on ne naît pas SDF, mais qu'on le devient : avant de se retrouver à la rue, les personnes sans domicile vivaient dans un logement.
La précédente majorité avait légiféré sur le logement et l'hébergement d'urgence en votant des mesures, mais le problème du logement n'a jamais été résolu. Il s'est même aggravé ces dernières années, et les financements publics de l'État n'ont cessé de diminuer de budget en budget.
Les politiques publiques de solidarité ont souffert ces dix dernières années de réorientations brutales, injustes et inefficaces et de la stigmatisation des ménages modestes.
À titre d'exemple, je me souviens, comme ma collègue Annick Lepetit, être intervenue ici même dans les débats sur la loi Boutin du 25 mars 2009 pour dénoncer le raccourcissement des délais d'expulsion de trois ans à un an. Cette disposition ayant pour conséquence, en période de crise et de pénurie de logement, de mettre toujours plus de personnes à la rue sans solution de relogement ou d'hébergement temporaire, j'avais insisté sur la nécessité de mettre en oeuvre une politique de prévention des expulsions et de travailler sur la question du relogement de ces personnes en détresse.
Le secteur du logement, chacun de nous le sait, est essentiel non seulement en raison de ses implications économiques directes, mais aussi parce qu'il reflète la santé sociale d'un pays, sa propension à endiguer ou à creuser les inégalités. C'est pourquoi il doit être traité comme une grande cause nationale, ainsi que le préconise le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. « Un toit est un droit ».
Un an après la publication du rapport de mes collègues Danièle Hoffman-Rispal et Arnaud Richard, nous pouvons faire ce seul constat : la situation évolue encore trop lentement quand on est à la rue. Mais le gouvernement de Jean-Marc Ayrault montre une réelle volonté de faire évoluer la situation. Des fonds ont d'ailleurs été débloqués à cette fin.
Le plan de lutte contre la pauvreté annoncé lundi va dans ce sens. Financé à hauteur de 2,5 milliards d'euros, il permettra d'investir massivement dans l'hébergement et l'accès au logement.
Il prévoit tout d'abord des mesures d'urgence : 9 000 places d'hébergement supplémentaires, à la fois pour l'hébergement classique et l'accueil des demandeurs d'asile. Il comporte ensuite des mesures structurelles d'accès au logement, qui bénéficieront d'un effort budgétaire équivalent. Ces aides devraient faciliter l'accès à un logement pour 9 000 ménages. La mise en oeuvre prochaine d'une « garantie universelle des risques locatifs » ouvrira en outre l'accès au logement aux personnes défavorisées. Enfin, ce plan reconduit l'objectif de construction de 150 000 logements sociaux par an.
Depuis sept mois le Gouvernement agit. Dès sa prise de fonction, la ministre de l'égalité des territoires et du logement avait décidé de maintenir l'ouverture de plusieurs centres d'hébergement à Paris et en région parisienne au-delà de la période hivernale. L'objectif était de rompre avec le système saisonnier actuel et d'éviter le retour à la rue à la sortie de l'hiver.
Dans le cadre de la loi de finances de 2013, les crédits consacrés à l'hébergement et à l'accès au logement des plus démunis ont augmenté de 4 % par rapport à 2012 et les moyens dédiés à l'hébergement d'urgence ont connu une hausse de 13 %.
À ces crédits supplémentaires vient s'ajouter, dès cette année, une enveloppe de 50 millions d'euros, destinés pour 80 % à la veille sociale et à l'hébergement d'urgence.
En décembre 2012, le Gouvernement a demandé aux préfets de procéder à des réquisitions, en particulier dans les zones tendues, pour répondre aux besoins d'hébergement.
La loi Duflot a permis notamment le renforcement de l'obligation de construction de logement social – la proportion minimale passe de 20 % à 25 % des logements, ce qui était d'ailleurs une préconisation du rapport – et la mobilisation du foncier public par un mécanisme de cession pouvant aller jusqu'à la gratuité.
Le développement de l'offre de logement, la rénovation de l'existant, l'accès et le maintien de tous dans un logement digne – prévention des expulsions locatives, lutte contre l'habitat indigne et les marchands de sommeil, encadrement des loyers – sont aujourd'hui, entre autres objectifs, au coeur des priorités du Gouvernement et de la majorité.
Le prochain projet de loi sur le logement, dont la concertation est en cours et qui sera, je l'espère, discuté dans les prochains mois, répondra à ces nombreuses urgences.
En conclusion, on ne peut que saluer et soutenir ces mesures qui correspondent à des choix politiques du Gouvernement et qui, non seulement répondent à l'urgence sociale, mais contribuent aussi à structurer la politique de solidarité sur le long terme.
Il reste néanmoins encore beaucoup à faire. Je pense en particulier aux Roms, dont les bidonvilles aux portes des grandes agglomérations ne cessent de grandir et dont, je ne vous apprends rien, les conditions de vie sont indignes.
Certes, madame la ministre, en sept mois il y a eu des avancées significatives, c'est indéniable ; nous sommes cependant encore loin des objectifs fixés.