Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière, le Gouvernement a nuitamment introduit en catimini, dans le cadre de la discussion du projet de loi relatif à la biodiversité, un amendement remettant en cause la notion de préjudice écologique, noyé dans un texte de soixante-quatorze articles. Cet amendement a été précipitamment retiré. On peut néanmoins s’interroger sur les intentions premières du Gouvernement.
Ne croyez-vous pas que tenter d’effacer le principe du pollueur-payeur revient à donner un chèque en blanc à tous ceux qui auront peu de scrupules à prévenir le risque de pollution lié à leurs activités ? C’est un coup dur après une bataille de quinze années, suite aux naufrages de l’Erika puis du Prestige. Ce combat juridique avait abouti, en septembre 2012, à une décision de la Cour de cassation reconnaissant le préjudice écologique.
En mai 2013, à l’initiative du sénateur Bruno Retailleau, le Sénat a voté à l’unanimité une proposition de loi visant à inscrire le préjudice écologique et son indemnisation dans le code civil. Mon collègue Alain Leboeuf et moi-même avons déposé en janvier 2013 une proposition de loi similaire, conforme au texte adopté au Sénat – un article unique, trois alinéas. Elle n’a jamais été inscrite à l’ordre du jour car la garde des sceaux, Mme Christiane Taubira, avait promis début 2013 de présenter un texte relatif à la responsabilité civile environnementale avant la fin de l’année. Christiane Taubira annonçait à nouveau un texte en février 2015. On attend toujours.
C’est un recul environnemental majeur porté par votre gouvernement, monsieur le Premier ministre. Si c’est une erreur, elle est dommageable. Si c’est une stratégie, elle est pitoyable !