Intervention de Nicolas Dufourcq

Réunion du 23 janvier 2013 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Nicolas Dufourcq, candidat à la direction générale de la BPI :

Comme tout le monde s'intéresse à la BPI, je consacre 40 % de mon temps à expliquer ce que je fais des 60 % qui restent. Je n'arrête pas de préfigurer… Il est possible que des articles de presse relatent que le « directeur général de la BPI, Nicolas Dufourcq,… », je n'y suis pour rien. M. Apathie, sur RTL, a précisé que j'étais préfigurateur, et Michel Field, sur LCI, a pris la précaution de dire : « si vous êtes confirmé par les commissions parlementaires,… ». Dans mon intervention liminaire, je l'ai dit, mais je ne peux pas le répéter à chaque phrase.

Je n'appartiens pas à un parti politique. Cela fait vingt ans que je fais du business. J'ai créé cinq PME entre vingt et un et vingt-six ans, j'ai perdu beaucoup d'argent. Ma profession, c'est chef d'entreprise. Dans ma première intervention publique, j'ai affirmé que la BPI serait une banque ni politique, ni idéologique. Les choses sont claires.

Pour le reste, s'agissant du CICE, dès que nous aurons l'instruction fiscale, les chefs d'entreprise pourront demander à l'antenne régionale d'OSÉO une avance de trésorerie. Elle sera calculée au mois le mois sur la masse salariale puisque le CICE correspond à 4 % de la masse salariale – 6 % l'année prochaine. Nous échelonnerons les avances, en accompagnant le versement des salaires de la PME.

Les vingt-deux comités régionaux d'orientation comprenant chacun vingt-cinq personnes, cela signifie qu'il y aura près de 600 personnes pour orienter la BPI. Pour que ces instances soient productives, je recommande au président de conseil régional d'en faire une sorte de comité de place réunissant tous ceux qu'animent l'intérêt général et le souci d'aider les PME françaises, un comité de « niaque » où se traitent les vrais sujets. Il serait vain de se couvrir une fois de plus la tête de cendres.

Dans les DOM, c'est l'Agence française de développement qui distribue nos produits et, pour l'instant, il n'est pas prévu de changer. Les TOM, eux, ne sont pas en zone euro, et nous n'y sommes pas présents. Peut-être y a-t-il là une faille.

Monsieur Mandon, la vitesse d'instruction des dossiers est une donnée fondamentale. La culture OSÉO en la matière, c'est l'extrême rapidité : cinq jours pour une garantie, quinze pour un crédit. Ces délais sont intenables dans l'activité fonds propres, mais, ceux de FSI Régions, certes pour de petits tickets, sont très inférieurs à ceux de la profession. C'est une machine à traiter les fonds propres particulièrement efficace : en 2012, quatre-vingt-cinq dossiers traités et quinze réalisations. On peut toujours demander d'accélérer les délais mais il ne faut pas oublier qu'il s'agit de sujets compliqués. En tout état de cause, on ne doit pas mettre six mois à dire non.

S'agissant des actions en faveur des entreprises en difficulté et de retournement, elles s'inscrivent dans une réalité. La nation nous confie 20 milliards d'euros d'épargne qu'il a fallu des dizaines d'années pour accumuler. À la fin de mon mandat, il faudra que je vous les rende, c'est un minimum. Donc, les entreprises en difficulté structurelle sur des marchés en décroissance, ce n'est pas pour la BPI. Elle doit se réserver pour les autres, celles qui ont une taille significative, sont sur un marché en croissance, mais qui font une crise d'adolescence, ou ont connu un problème transitoire. C'est ce qu'on appelle le retournement : nous y serons, mais pas seuls. Nous mettrons un ticket de 15 % si, d'aventure, l'entreprise trouve un investisseur pour la reprendre.

En ce qui concerne les fonds de retournement destinés aux petites PME, le privé n'y va pas. Et pour cause : on y perd 90 % de sa mise. C'est le segment le plus dangereux de la profession. Si la BPI doit faire du retournement, je le dis tout net : il nous faut une enveloppe spécifique, prise ailleurs que sur nos fonds propres. Si vous décidez de nous donner 400 millions d'euros par exemple, il faut que tout le monde sache que, probablement, nous n'en rendront que 100. C'est la règle.

Les TPE sont au centre de notre stratégie. Les 500 millions d'euros de facilité de trésorerie mis en place par OSÉO depuis début janvier profitent à 80 % aux TPE. Le préfinancement CICE bénéficiera également aux TPE auxquelles sera dédié un petit fonds de garantie.

La KfW est un modèle pour nous, mais nous ne lui ressemblerons pas complètement : elle fait pour le moment exclusivement du refinancement bancaire, même si elle va lancer une activité de crédit direct sur Internet. Ce qu'il faut retenir, c'est que cet établissement est profilé pour maintenir sa réputation inaltérable parce qu'il se finance sur les marchés. Il doit en être de même pour la BPI qui est amenée à se refinancer de plus en plus sur les marchés obligataires mondiaux, d'où l'importance vitale du modèle prudentiel.

Madame Rabault, aidez-nous à faire savoir partout que la facilité est en place et que nous attendons les clients.

En revanche, une organisation par secteur est inenvisageable parce qu'elle serait trop coûteuse. Nous nous efforçons donc de mettre en place une organisation par métier, selon un schéma matriciel transversal, qui mette en relations les spécialistes entre eux.

En ce qui concerne les filières, mon expérience m'a appris qu'il y a toujours une excellente entreprise, deux ou trois bonnes, et beaucoup de moyennes. Le rôle de la BPI n'est pas de saupoudrer ses concours sur les plus nombreuses. Elle doit au contraire concentrer ses efforts sur la très bonne qui va consolider les autres. Pour moi, les fonds filières sont des fonds champions. On doit trouver le champion, celui qui sera au rendez-vous France 2030.

Le FCDE existe, il a été créé par la Médiation du crédit avec un apport de 49 % de la BPI et de 51 % du privé. Il fonctionne correctement puisqu'il est intervenu dans une dizaine d'opérations, mais il est un peu insuffisant à l'échelle des problèmes, d'où mes déclarations sur les fonds régionaux de retournement.

Monsieur Dassault, si j'ai parlé du dragon de l'amertume, c'est parce que nos clients ne nous demandent pas assez de crédits ou de fonds propres. Tous les dispositifs sont en place, l'argent est là, les hommes aussi, la signature d'OSÉO sur les marchés est excellente et le crédit n'est pas cher. Il ne manque que l'appétit des chefs d'entreprise. Que peut faire la BPI ? Exercer un magistère de la parole – qui n'est ni politique ni idéologique – en direction des entrepreneurs, pour les inciter y venir chez elle.

Quant aux PPP, ils sont du ressort exclusif de la Caisse des dépôts et consignations. La répartition des tâches est très claire entre les deux opérateurs.

Je vous remercie de votre attention.

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