Intervention de Jean-Louis Roumegas

Réunion du 23 janvier 2013 à 9h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Roumegas, rapporteur :

Je remercie Bernadette Laclais : son intervention illustre le climat de confiance qui a régné entre nos groupes politiques ainsi qu'entre la commission du développement durable et celle des affaires sociales. Nos commissions ont travaillé dans une parfaite harmonie, en tenant compte des auditions que nous avons menées auprès de l'ensemble des parties prenantes – agences, organisations professionnelles, syndicats de salariés et organisations représentatives des employeurs – afin de renforcer l'efficacité de ce texte.

S'agissant des remarques de Bernard Accoyer et des autres intervenants du groupe UMP, je ne m'attendais pas à un clivage partisan sur un tel sujet. Le Grenelle de l'environnement – que vous aviez initié – a déjà prévu, en effet, ce type de dispositif. Notre ancien collègue Yves Bur lui-même a appelé à la création d'une commission de déontologie afin de mettre un terme à l'anarchie qui règne dans ce maquis d'agences manquant d'indépendance et de lisibilité. Bref, nous essayons de répondre à des revendications issues de tous les camps politiques. Mais ce n'est pas la première fois que l'opposition renie les décisions qu'elles avaient prises dans le cadre du Grenelle !

Certaines de vos interventions sont constructives : ainsi reconnaissez-vous l'existence du problème. Mais vous dénoncez les réponses que nous y apportons. J'ai l'impression que vous en êtes restés au texte issu du Sénat sans lire les propositions que nous avons élaborées au terme de nombreuses auditions. Ceux de vos amendements qui relaient l'avis d'organisations professionnelles seront d'ailleurs satisfaits puisque nous en avons repris l'objet dans les nôtres. Il est regrettable que vous n'ayez pas assisté à nos auditions, monsieur Accoyer !

Vous nous reprochez de ne pas avoir entendu certains organismes de recherche tels que l'Académie des sciences, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) ou l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) mais je n'ai reçu vos demandes d'audition par courrier qu'il y a deux jours – autrement j'en aurais volontiers tenu compte ! Quoi qu'il en soit, les agences existantes ne se sentent nullement concurrencées par la création de cette commission nationale – qui n'est pas une agence. Elles y voient au contraire une garantie car elles ont besoin d'un regard extérieur en matière de déontologie et d'une harmonisation des règles applicables. Cette commission de sages n'aura nullement un rôle d'expertise mais sera chargée de formuler des recommandations d'ordre déontologique et de s'assurer que les alertes sont bien prises en compte par les pouvoirs publics. Vous nous reprochez de créer une usine à gaz permettant au premier venu de saisir la commission sur n'importe quel sujet : non ! C'est précisément tout le contraire que nous vous proposons. Nous souhaitons justement mettre un terme à la situation actuelle où des alertes totalement infondées peuvent apparaître sur la place publique, provoquant parfois des scandales inutiles et paralysant la vie des entreprises et les pouvoirs publics.

Voilà pourquoi nous voulons rationaliser le circuit de l'alerte. Ainsi, tout le monde ne pourra pas saisir cette commission nationale car des filtres sont prévus. Tous les parlementaires, en revanche, auront un droit de saisine. La proposition de loi garantit en outre que toute alerte sera traitée par la commission et fera l'objet d'une réponse de sa part. Cela permettra d'éviter les scandales médiatiques. Force est de constater que, dans des affaires récentes, certains lanceurs d'alerte sérieux n'ont pas été entendus, ce qui a coûté extrêmement cher et fait perdre beaucoup de temps aux entreprises et aux pouvoirs publics.

Cela étant, il est déjà arrivé, y compris aux représentants de l'État de lancer de fausses alertes, comme dans l'affaire de la grippe H1N1 qui a tout de même coûté la bagatelle d'un milliard d'euros au contribuable !

S'agissant des lanceurs d'alerte en entreprise, vous semblez ne pas avoir lu la nouvelle version que nous vous proposons : nous comptons en effet remanier le texte adopté au Sénat, non pas pour le vider de son sens mais afin de tenir compte des négociations entre les partenaires sociaux. Nous ne souhaitons nullement nous substituer à eux en accordant de nouvelles prérogatives aux organisations représentatives du personnel, en particulier au CHSCT. En outre, le texte du Sénat ne prévoyait pas les moyens nécessaires à l'exercice de ces prérogatives. La nouvelle rédaction de l'article 9 que nous proposons par amendement garantira que ces alertes seront effectivement traitées.

Nous avons également envisagé l'hypothèse où, dans une entreprise, l'employeur et les représentants du personnel s'entendent, en raison d'un intérêt commun, pour ne pas traiter une alerte émanant d'un lanceur d'alerte isolé, en dépit de l'intérêt réel qu'elle présente pour la population et de l'impact d'un produit sur la santé publique ou l'environnement. Ce fut notamment le cas lors de l'affaire des prothèses PIP. Dans ces cas-là, nous avons souhaité que l'alerte soit traitée, mais de façon rationnelle, en faisant appel aux préfets, afin d'éviter les scandales inutiles.

Finalement, le seul point sur lequel je m'accorde avec Bernard Accoyer, c'est que ce texte est d'une importance considérable.

Je remercie Christian Paul et Gérard Sébaoun ainsi que Fanélie Carrey-Conte d'avoir montré que, loin de créer une société de l'alerte permanente, nous rationalisons au contraire le traitement des alertes tout en évitant les abus et la suspicion. L'exemple de M. Gilles-Éric Séralini est éclairant à cet égard : il importe d'être en mesure de commander des études indépendantes à des instances capables de produire des évaluations contradictoires pour en finir avec les invectives et les jugements à l'emporte-pièce dans la presse. Ce que nous souhaitons par-dessus tout, c'est qu'il n'y ait plus aucun scandale sanitaire !

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