Intervention de Gérard Bapt

Réunion du 8 mars 2016 à 21h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Bapt :

Notre amendement vise à rétablir l'interdiction de tous les produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes, y compris les semences traitées avec ces produits – que Mme Delphine Batho et moi-même avions fait adopter par l'Assemblée nationale en avril dernier –, tout en reportant d'un an la date d'application de cette interdiction. Le Sénat a en effet supprimé cette disposition – avec l'accord du Gouvernement, me semble-t-il – en adoptant une mesure qui, si elle tient compte de la dangerosité de plus en plus reconnue de ces produits, se situe en deçà d'une interdiction générale.

Que s'est-il passé depuis le vote du texte en première lecture à l'Assemblée nationale ? Une mobilisation importante a eu lieu, dont rend compte, du reste, le nombre important des signataires de cet amendement, et des éléments nouveaux sont apparus. Tout d'abord, une étude de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), commandée par le Gouvernement, a confirmé la nécessité de maintenir le moratoire de trois ans décidé au niveau européen, moratoire qui concerne cependant l'utilisation de trois substances contenant des néonicotinoïdes et qui est limitée à certaines cultures pendant certaines saisons. Ensuite, une étude conjointe de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a, pour la première fois, démontré la nocivité de ces substances pour les colonies d'abeilles. Une autre étude, publiée à Londres par la Royal Holloway University, a prouvé la réduction des services de pollinisation assurés par les bourdons et a mesuré, pour la première fois, les conséquences économiques d'une telle réduction sur la production de pommes. Enfin, une étude du ministère de l'écologie publiée en novembre 2015 sur la détection des pesticides dans les cours d'eau français a montré que le néonicotinoïde le plus vendu en France a connu une progression fulgurante, qui témoigne de l'extraordinaire succès commercial que rencontrent les produits de cette famille.

De fait, cet insecticide neurotoxique est très efficace, bien plus encore que le dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT), par exemple, qui a été retiré du marché en Europe et dont on a montré, au Brésil, où il est encore utilisé dans les favelas, qu'il augmentait les risques de malformation à la naissance. On connaît très bien les mécanismes par lesquels ces produits portent atteinte à la biodiversité. En revanche, on ne connaît pas encore leurs effets à long terme sur l'homme, notamment sur le développement des enfants ou au stade foetal. Toutefois, la nicotine est interdite aux femmes enceintes et des études cliniques menées au Japon – où le Gaucho est très utilisé – ont révélé des cas d'intoxication suraiguë entraînant l'hospitalisation d'adultes, sur qui l'effet décline en deux à trois semaines. J'ajoute qu'il est désormais démontré que ces substances sont nocives pour les pollinisateurs sauvages que sont les bourdons et les abeilles, mais aussi pour les papillons nocturnes.

C'est pourquoi nous vous proposons, avec le soutien de la corporation des agriculteurs, d'interdire ces néonicotinoïdes, qu'ils soient utilisés en semences ou en épandage foliaire, à compter du 1er janvier 2017.

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