Intervention de Jacqueline Fraysse

Séance en hémicycle du 10 mars 2016 à 15h00
Interdiction de licenciement à la suite d'un congé maternité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

Sans parler des mesures annoncées dans le cadre du projet de loi réformant le code du travail, qui s’inscrivent dans cette même logique de recul des droits sociaux au nom, paraît-il, de la défense de l’emploi, ce qui est un mensonge flagrant. Je ne reviens pas sur les propos de M. Schwartzenberg, dont je partage l’analyse.

Dans un tel contexte, il y a lieu de saluer l’objectif de ce texte qui entend au contraire protéger plus fortement le contrat de travail des mères et des pères.

Je voudrais toutefois vous alerter sur le fait que la législation actuelle peut déjà être contournée si l’employeur décide d’utiliser la rupture conventionnelle, ce qui restera bien sûr possible malgré les nouvelles dispositions dont nous débattons. La portée du texte s’en trouvera malheureusement restreinte.

En effet, depuis un arrêt du 25 mars 2015, la Cour de cassation admet que le contrat de travail soit rompu conventionnellement pendant la période de protection.

Bien que ce mode de rupture nécessite l’accord des deux parties au contrat, il est fréquent, malheureusement, que la rupture conventionnelle résulte d’une initiative de l’employeur que les salariées concernées ne sont pas en situation de refuser. De plus, si des pressions ont été exercées, il sera compliqué, en pratique, pour la salariée de le prouver.

Par ailleurs, si ce texte constitue une réelle avancée, il reste très modéré au regard des législations beaucoup plus favorables que plusieurs pays européens appliquent.

Ainsi, en Espagne, la protection contre le licenciement à l’issue du congé de maternité court jusqu’au neuvième mois de l’enfant, et jusqu’au douzième en Italie, ce qui pourrait nous inciter à allonger encore davantage la durée de protection contre le licenciement au retour du congé de maternité.

Rappelons, pour conclure, que la situation des femmes salariées reste indéniablement préoccupante dans notre pays, comme le confirme une étude de la DARES de mars 2015. Les femmes sont en effet plus nombreuses que leurs collègues masculins à occuper des emplois peu qualifiés et des postes à temps partiel. Leur salaire reste toujours inférieur de 10 % à celui des hommes pour un poste équivalent. Quant à leurs perspectives de promotion et de progression salariale, elles sont aujourd’hui encore largement plus faibles.

Pour toutes ces raisons, les députés du Front de gauche voteront sans hésiter ce texte qui constitue une réelle avancée, et permettra de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale pour les parents, les mères comme les pères. Nous invitons cependant la représentation nationale et le Gouvernement à poursuivre le travail pour aller plus loin, tant la situation l’exige.

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