Intervention de Yves Fouquet

Réunion du 23 janvier 2013 à 9h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Yves Fouquet, chef du laboratoire de géochimie et métallogénie de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, IFREMER :

Parmi les ressources minérales marines, il y a les nodules polymétalliques qui sont des oxydes de manganèse qui reposent par 5 000 mètres de fond, les encroûtements d'oxyde de manganèse eux aussi situés en grande profondeur, et, associés aux volcans sous-marins, les sulfures hydrothermaux contenant du cuivre, du nickel, du cobalt, du platine, de l'argent, de l'or et des métaux rares. En milieu moins profond, on exploite les granulats marins.

Ces ressources ne sont pas exploitées pour l'instant. Depuis plus d'une trentaine d'années, la France, grâce à son potentiel scientifique et technologique, avec notamment la théorie de la tectonique des plaques née dans les années 1960-1970 et la mise au point d'engins sous-marins qui ont permis des explorations plus fines, compte parmi les meilleurs mondiaux pour la connaissance à la fois géologique et biologique des grands fonds marins.

Nous travaillons à la fois dans la zone économique exclusive (ZEE), c'est-à-dire à l'intérieur de la zone des 200 milles marins, et dans les eaux internationales. Pour ces dernières, un cadre juridique s'est mis en place au travers de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM), organisation internationale établie en Jamaïque et qui regroupe les 162 pays parties à la convention de Montego Bay de 1982. Ont pu être adoptées, en 2000, une législation spécifique pour les nodules de grands fonds et, en 2011 une règlementation pour les sulfures hydrothermaux. Un troisième accord, relatif aux encroûtements polymétalliques, est en cours de discussion ; il devrait aboutir l'année prochaine.

Pour ce qui est des nodules, il existe aujourd'hui treize permis d'exploration. Deux ont été délivrés en 2011 et deux autres en 2011. C'est dire le regain d'intérêt pour ce domaine. S'agissant des sulfures, dès 2011, la Russie et la Chine ont déposé des permis, l'une dans l'Atlantique, l'autre dans l'Océan Indien. La France a elle aussi soumis un dossier, encore en cours de discussion, mais qui a été accepté l'an dernier.

L'AIFM cherche à mieux connaître les ressources potentielles des eaux internationales et à les valoriser au regard des enjeux environnementaux et de biodiversité dans la perspective d'une éventuelle exploitation. Les ressources des eaux de notre ZEE n'ont pas encore été inventoriées ni même cartographiées. Ce travail reste à accomplir. Avec 11 millions de km2, notre ZEE est la deuxième au monde, après celle des Etats-Unis – même si d'un point de vue législatif et réglementaire, il existe des spécificités pour les territoires d'outre-mer comme la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie.

En 2000, un groupe de travail national, piloté par l'IFREMER et associant les universités, le CNRS et d'autres organismes de recherche, a élaboré un rapport sur la stratégie française en matière de ressources minérales marines. Ses recommandations ont été reprises par le Comité interministériel de la mer de juin 2011 qui a conclu à la nécessité d'une véritable stratégie nationale autour des ressources minérales marines – orientation reprise par l'équipe gouvernementale actuelle. À l'initiative du ministère de la recherche, une expertise collective est en cours autour des questions d'environnement pour les deux volets exploration et exploitation.

Je veux dire un mot du volet énergétique. L'IFREMER n'a pas vocation à rechercher du gaz ou du pétrole, mais il est souvent consulté par des compagnies françaises ou étrangères sur certains risques physiques comme ceux que peuvent représenter les hydrates de méthane pour les plateformes pétrolières, ou bien encore sur des questions environnementales comme la biodiversité dans les grands fonds. Il faut mentionner également le programme national Extraplac d'extension du plateau continental au-delà des 200 milles.

Je citerai une action exemplaire en matière d'inventaire, conduite à Wallis-et-Futuna dans le cadre d'un partenariat public-privé et d'une autorisation de prospection préalable (APP), dans une zone vierge, dont nous ne disposions pas même de la carte. En deux ans, nous avons dressé l'inventaire de sa minéralisation. Nous y avons notamment trouvé des sulfures et des encroûtements. Ce ne sont pas nécessairement les plus riches, mais les résultats sont encourageants, et nous discutons actuellement d'un dépôt de permis d'exploration.

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