Au moment où les pouvoirs publics semblent préparer l'opinion à de futurs attentats de grande ampleur, nous devons nous interroger sur la stratégie mise en place par l'État pour prévenir la radicalisation. J'insiste sur la nécessité d'articuler un partenariat entre les pouvoirs publics et la société civile à travers différents acteurs, dont notre association, pour lutter contre l'idéologie qui nourrit le terrorisme. Nous partons du principe que le terrorisme n'est pas le fruit d'une génération spontanée. Dans ce cadre, nous travaillons avec de nombreux intervenants, y compris au sein de l'Union européenne, sur la voix des victimes, en tant que contenu et vecteur de promotion d'une citoyenneté positive. La voix des victimes peut être un très bel outil de prévention dès lors que les victimes sont elles-mêmes dans une perspective de reconstruction et qu'elles se sentent la force de faire la promotion des valeurs qui nous unissent tous.
La thématique de la radicalisation est très médiatique, si bien que certains effets de communication peuvent cacher les vrais enjeux, face auxquels il ne peut y avoir d'approche exclusive. C'est, au contraire, une approche pluridisciplinaire qui doit prévaloir. Nous menons donc nos actions de prévention en collaboration avec l'association « Onze janvier », fondée et présidée par Mohamed Sifaoui, et l'association « Entr'Autres », qui regroupe un collectif de psychiatres, de psychanalystes, de praticiens de terrain, qui suivent des profils djihadistes depuis une dizaine d'années.
Il nous paraît important de décomplexer le débat autour de ces questions, en nommant notre ennemi idéologique, l'islamisme, qui nourrit le corpus idéologique des terroristes et qui est l'une des conditions du passage à l'acte.
Lorsque nous organisons des rencontres auprès des citoyens, en milieu carcéral ou ailleurs, dans le cadre de nos modules de sensibilisation, nous constatons avec inquiétude que les agents de l'État éprouvent des doutes sur leurs missions et des fragilités idéologiques : cela peut créer des brèches que ne manquent pas d'exploiter les extrémistes ou ceux qui relaient leur discours.
Le 5 janvier dernier, dans un communiqué de presse, nous avons interpellé l'État sur sa stratégie en la matière, qui ne nous paraît pas très claire. Acteurs de la société civile, nous souhaitons être associés, avec les ressources que nous pouvons proposer, à ce travail d'élaboration sur le long terme, qui dépasse de loin les enjeux de la communication politique.