Il existe en effet deux ou trois HAD en France qui ne sont qu'un numéro de téléphone, piochant ici une aide-soignante, là un infirmier pour composer une équipe modifiable en permanence. Mais le décret évoqué par Mme Solène Gouesbet a vocation à mettre fin à ces pratiques en définissant un noyau dur obligatoire pour toutes les équipes d'HAD. Il ne faut pas jeter l'opprobre sur les situations en question car on a demandé à ces structures d'adopter ce mode de fonctionnement. La CNAM a longtemps considéré le développement de l'HAD d'un oeil torve ; quant aux syndicats de professionnels de santé libéraux, ils y ont vu une structure qui leur enlevait le pain de la bouche. Des compromis locaux ont ainsi conduit à créer de l'HAD en mobilisant les ressources libérales existantes. C'est plutôt positif : dans les territoires excentrés, répondre aux besoins des patients exige de travailler avec les médecins et les infirmiers libéraux. Dans l'immense majorité des cas, nos adhérents sont dans des modèles mixtes et équilibrés, avec du temps salarié et libéral.
Ces défaillances sont aussi le fruit des compromis locaux qui tiennent aux difficultés que l'HAD a connues avec la CNAM, très attachée à son dialogue exclusif avec les professionnels de santé libéraux – médecins et infirmiers – et les prestataires de soins à domicile. La DGOS et la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) ont eu tendance à défendre les structures autorisées, HAD et SSIAD, tandis que la CNAM défendait les professionnels de santé libéraux avec lesquels elle a un monopole de négociation. La CNAM a donc été un régulateur non seulement présent, mais délibérément agressif ; certains adhérents ont même parfois parlé d'intimidation. J'ai notamment été étonné de vous entendre souligner la dimension sociale de l'HAD. En effet, pour être éligible à l'HAD, un patient doit aujourd'hui présenter des indications de soins aigus car les médecins contrôleurs de la CNAM sont sans pitié dans le contrôle de tarification à l'activité (T2A) pour toutes les situations où, selon eux, il faudrait procéder à une hospitalisation à plein-temps. Pour eux, l'HAD doit être totalement distincte du SSIAD. La loi de modernisation de notre système de santé prône l'alignement stratégique entre l'État et l'assurance maladie dans la question du développement de l'HAD que vous appelez de vos voeux. Il faut faire fonctionner ensemble les outils réglementaires et financiers de la DGOS, et les outils conventionnels – la négociation entre la CNAM et les médecins libéraux, et la politique de contrôle T2A – pour parvenir à un équilibre plus dynamique où les deux régulateurs et financeurs travailleraient dans la même direction.