Je dois d'abord vous dire que plus j'avançais dans mes travaux pour le rapport, plus je considérais qu'améliorer le système dans le cadre du paritarisme m'apparaissait possible. Il ne me semble pas évident que l'on fasse mieux avec l'échevinage. La loi d'août 2015 me paraît aller dans le bon sens, à condition que les conseils de prud'hommes s'approprient la réforme et acceptent de jouer le jeu. Elle donne des possibilités en matière de procédure qui permettent de traiter efficacement les affaires. Les parties ont désormais l'obligation de fournir leurs pièces avant même la première convocation pour conciliation. Je n'arrive pas à comprendre comment on pourrait tenter une conciliation sans savoir quel est le fond de l'affaire – c'est pourtant la position défendue par certains. Ensuite, le conseil a la possibilité de fixer des délais contraignants pour les échanges des écritures entre les parties et des documents justificatifs, avec une date de clôture passée laquelle il n'est plus possible de présenter de nouvelles pièces, ce qui me paraît essentiel pour éviter les renvois qui perturbent considérablement le fonctionnement des juridictions. Possibilité est également donnée d'utiliser des circuits diversifiés : juger immédiatement si le défenseur ne comparaît pas me paraît important puisque le conseil sera dorénavant déjà en possession des pièces, en gardant à l'esprit qu'il s'agit davantage d'inciter le défenseur à comparaître ou à se faire représenter pour organiser, le cas échéant, une conciliation voire une médiation. Le conseil a justement la possibilité de consacrer du temps à la conciliation. Il a encore la possibilité d'utiliser des circuits courts. Certaines affaires, ne méritant pas d'être renvoyées devant un bureau formé de quatre personnes, peuvent être jugées par deux personnes. Pour d'autres, le conseil prud'homal sait par expérience que le bureau de jugement se mettra en départage : pourquoi ne pas renvoyer directement à la formation présidée par le juge départiteur ?
Il ne s'agit pas de mettre sous contrainte ou sous tutelle l'institution prud'homale mais de lui donner une palette de solutions pour mieux traiter le contentieux. Il lui appartiendra de s'approprier ces nouvelles possibilités.
S'agissant de la barémisation, monsieur le rapporteur, nous pouvons dire que le Conseil constitutionnel, s'il s'est montré défavorable à l'un des critères retenus, ne s'est pas prononcé contre son principe. Je préférerais un système où il y aurait une possibilité pour le juge de sortir du barème dans des circonstances particulières.
Autre point important : il ne faut pas penser que la barémisation de certains types d'indemnités va forcément simplifier le travail des juges prud'homaux et assurer une prévisibilité certaine pour les entreprises. De plus en plus, les chefs de demande sont multiples – harcèlement, manquement à l'obligation de sécurité, manquement à l'obligation de prévention contre le risque de santé. On ne peut pas tout barémiser.