Intervention de Jean-Pierre Door

Réunion du 15 mars 2016 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Door :

Je ne reviendrai pas sur les raisons pour lesquelles le groupe Les Républicains s'est fortement opposé à la généralisation obligatoire du tiers payant. Nous sommes ici pour mesurer les conséquences de cette décision.

Saisi par les parlementaires de l'opposition, le Conseil constitutionnel a invalidé une partie du dispositif du tiers payant généralisé, au motif que les garanties nécessaires – respect d'un délai, versement d'une pénalité en cas de non-respect de ce délai – n'étaient prévues que pour la part obligatoire. Ainsi, comme l'ont remarqué les syndicats de médecins, devant la complexité du mécanisme, et alors que le rapport laisse reposer les risques techniques et financiers sur les médecins pour la part complémentaire, le tiers payant intégral ne se fera pas – en tout cas, pas en l'état actuel des choses.

Mon intervention portera donc sur la part obligatoire.

Monsieur Revel, ce rapport se veut équilibré, prudent, tout en essayant de rassurer. Il évite consciencieusement le sujet qui fâche, autrement dit le financement. L'article 83 de la loi prévoyait pourtant que le rapport devait évaluer la faisabilité opérationnelle et financière des solutions techniques appropriées. Combien cette réforme – que nous jugeons inutile car non ciblée – va-t-elle coûter ? Et qui va payer ? Je rappelle que le groupe Les Républicains n'est pas opposé à la mise en place d'un tiers payant dès lors qu'il est ciblé sur les personnes en difficulté ou sur certaines catégories de patients. Est-il vrai que le coût de la procédure représenterait 3 euros à 3,50 euros par acte pour le professionnel de santé ?

Ce rapport retient la mise en oeuvre d'une garantie de paiement pour les médecins. C'est bien la moindre des choses. Il s'agit bien de la fameuse garantie totale que la mission IGAS (Inspection générale des affaires sociales), dont un rapport sur le tiers payant est souvent cité par Mme la Présidente, préconisait de ne pas retenir, en raison des risques de fraudes associés à cette possibilité et de la complexité potentiellement induite par une récupération de minorations auprès de l'assuré. A-t-on mesuré toutes les conséquences de cette garantie totale ?

Ce rapport n'aborde pas la question de la récupération des franchises. La loi fixe un mécanisme de récupération. Mais comment allez-vous procéder concrètement, monsieur le directeur général ?

La question du délai maximum et des pénalités afférentes n'est pas non plus traitée. Des estimations ont-elles été réalisées ?

Si les délais moyens de paiement semblent assez bien maîtrisés, force est de constater qu'ils sont inégaux selon les caisses et les régimes. Il est faux de dire que ces délais ne seront pas un sujet.

Autre sujet non abordé : les conséquences en termes d'inflation. Notre présidente va encore me dire qu'il n'y aura pas de conséquence. Ce n'est pas tout à fait vrai. Le rapport IGAS précité indique que la seule étude disponible porte sur des données très anciennes et très partielles, si bien que sa recommandation n° 5 vise à réaliser une étude sur les conséquences financières de la généralisation du tiers payant, un tiers payant dont il recommandait une généralisation non obligatoire.

Enfin, ce qui a facilité la mise en oeuvre du tiers payant dans les pharmacies, c'est le recours massif à des intermédiaires – organismes concentrateurs techniques, sous-traitants pour la gestion des rejets –, ainsi que la mise à jour rapide du parc de logiciels. Tout cela a un coût. Nous ne trouvons rien dans ce rapport sur la répartition éventuelle de ce coût. Les médecins seront-ils obligés de payer ? L'Assurance maladie prendra-t-elle en charge des surcoûts ?

Monsieur le directeur général, je suis bien conscient que vous devez mettre en application une disposition votée par le Parlement. Vous ne pourrez probablement pas répondre à toutes ces interrogations, car cette décision politique a été très mal prise au départ. Il est cependant de notre devoir, en tant que parlementaires de l'opposition, de pointer les risques inhérents à la généralisation du tiers payant obligatoire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion