Intervention de Général Philippe Boutinaud

Réunion du 16 mars 2016 à 16h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Général Philippe Boutinaud, commandant la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris :

La partie budgétaire relève directement de ma responsabilité. Je confirme que la discussion budgétaire a été quelque peu compliquée. Pour l'année 2016, j'ai fait valoir des arguments auprès du préfet de police qui, intimement convaincu qu'il fallait préserver les moyens opérationnels de la BSPP, les a relayés auprès de la municipalité de Paris puis au Conseil de Paris. Fort heureusement, le budget de la BSPP pour 2016 lui permet de remplir sa mission. Les éventuels problèmes budgétaires ont-ils eu un impact sur ce qui s'est passé le 13 novembre ? Très franchement, non. Toute la rationalisation de la BSPP à laquelle il a été procédé touche le soutien logistique mais n'a absolument pas affecté la partie opérationnelle.

En outre, nous avons en effet fermé des sites au cours des deux années précédentes mais, grâce au budget que j'ai pu obtenir pour 2016, il n'y en aura pas d'autres. Et si le budget avait diminué, les sites concernés par une fermeture auraient été des centres de secours. Aussi la couverture opérationnelle de la BSPP n'est-elle en rien touchée.

En ce qui concerne le PRAC et la difficulté de circulation, la vérité statistique m'oblige à vous dire que, si les critères d'analyse restaient constants, la fermeture de voies entraînerait bien évidemment une augmentation des embouteillages. Il se trouve qu'au cours des années précédentes on n'est jamais parvenu à établir, statistiquement, que la fermeture d'un certain nombre d'axes à la circulation ralentissait les secours. Je vous le dis en toute sincérité. En effet, les gens s'y adaptent et la circulation diminue. En revanche, et je suis très attentif à ce point, les aménagements tout au long des axes, comme les bordures de trottoir qui délimitent les pistes cyclables, constituent un obstacle à la mise en station des échelles en cas d'incendie. Mais pour ce qui est de la limitation des itinéraires dans Paris, je ne suis pas en mesure, statistiquement, de vous prouver, j'y insiste, qu'elle ralentit les secours. Enfin, je n'entends pas entrer dans le débat politique.

Professeur Pierre Carli. Monsieur le député, de quoi parlons-nous ? Nous parlons d'urgences graves, de victimes qui sont prises en charge parce qu'elles souffrent d'une plaie par balle, tirée par un fusil d'assaut militaire, ou d'une lésion liée à une explosion. Ce type de victime bénéficie d'un circuit d'urgence qui est celui des polytraumatisés et des blessés les plus graves. Ce circuit est balisé par l'ARS pour un certain nombre d'hôpitaux publics. Or, dans ces hôpitaux il y a des chirurgiens formés pour les prendre en charge et il y a un dispositif très particulier qui est l'utilisation du circuit à rebours, c'est-à-dire l'utilisation de la salle de surveillance post-interventionnelle comme salle d'entrée dans le bloc opératoire, procédure qui fait l'objet d'exercices que les centres de traumatologie sont capables de réaliser.

Comme je vous l'ai indiqué, et c'est probablement le sens de votre question, il n'y a pas beaucoup, ici, de blessés légers. Ceux que nous appelons des urgences relatives sont des blessés graves qui sont stables, mais il n'y a pas, j'y insiste, de petits blessés, et il est donc difficile de les envoyer dans d'autres établissements. Car on ne fait bien que ce qu'on fait souvent.

Je vais vous raconter une anecdote pour vous montrer que les propos d'aujourd'hui sont les mêmes que ceux d'hier. Un des graves attentats de 1995 a été commis à proximité de l'Hôtel-Dieu, où l'on ne pratique plus que de la chirurgie digestive. Dans cet hôpital se trouve également un grand service d'obstétrique, dont le chef est un ancien militaire qui connaît parfaitement la chirurgie de guerre. Il a envoyé des lettres de protestation à tout le monde, au maire, au député… pour dénoncer le scandale de n'avoir pas reçu, le jour de l'attentat, des victimes qui pourtant étaient très proches de son lieu d'exercice. Nous ne mettons pas en doute la compétence de nos collègues du privé – ce sont des gens extraordinaires – mais les circuits, on ne peut pas les inventer au dernier moment. Voilà la réponse à votre question.

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