Nous étions informés dès le début de ce qui se tramait. À 4 heures du matin, nous avons eu connaissance de manière très précise du nombre de corps que nous étions susceptibles d'accueillir. Mais nous étions d'ores et déjà organisés, y compris pour apporter notre appui à d'autres titres. L'Institut médico-légal s'est mis tout de suite en ordre de marche et il a pu recevoir les corps dès 6 heures du matin.
Professeur Bertrand Ludes. Je confirme ce que vient de dire M. le directeur. Nous étions en alerte dès la veille et avions déjà contacté nos collègues pour qu'ils soient présents dès l'arrivée des premiers corps.
Le procureur de la République a décidé de concentrer les moyens sur un seul centre. L'IML comporte une salle dite de catastrophe, qui permet d'accueillir 200 corps. Et l'autorité judiciaire peut décider de la mobiliser.
Par ailleurs, nous avons reçu l'appui de nos collègues de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) : le général Yves Schuliar s'est rendu sur place dès le samedi, et trois médecins sont venus nous épauler dès le début des opérations thanatologiques, le dimanche matin, ainsi qu'une équipe de balisticiens, qui nous a apporté une aide indispensable.
En ce qui concerne l'accueil, nous avons mobilisé nos agents et la psychologue de l'Institut. Nous avons accueilli quatre familles le samedi après-midi et procédé à deux présentations de corps. Le dimanche 15 novembre, vingt-six présentations ont eu lieu ; le lundi 16 novembre, quarante-trois ; le mardi, trente-sept ; le mercredi, vingt-huit ; le jeudi, dix-huit ; le vendredi, dix-sept ; le samedi, huit. Puis ces présentations ont suivi un rythme moins soutenu dans la mesure où les familles avaient déjà pu voir le corps de leur défunt.
Nous avons étendu les horaires d'ouverture autant que faire se peut : l'Institut permettait les départs de corps à partir de 7 heures 30 du matin jusqu'au soir, vers 18 heures ou 18 heures 30 pendant la semaine qui a suivi nos opérations. Les départs pour inhumation ont commencé à partir du jeudi.
S'agissant des interlocuteurs, les familles ont certainement eu affaire à diverses personnes. Le problème des créneaux se posait, compte tenu du nombre très important de demandes. Il fallait que nous puissions répondre à chacune des familles. Nous avons fait en sorte que toutes les familles puissent voir une fois le corps avant d'autoriser des deuxièmes ou des troisièmes présentations.
On ne peut donc pas parler de fonctionnement ordinaire. Nous nous sommes organisés en fonction de l'ampleur des événements. Nous avons même reçu des familles la nuit pour certaines présentations difficiles.
Vous avez cité le cas de ces parents qui ne trouvaient plus trace du corps de leur fils. Nous ignorons quand les corps partent des hôpitaux, nous les enregistrons à leur arrivée à l'Institut. Je ne peux donc pas me prononcer sur ce qui se passe auparavant.