Si l'on s'apprête à solliciter le contribuable, c'est qu'EDF est en crise, voire en danger mortel. Nous pensons qu'il est encore temps de la sauver, à la condition toutefois de poser le bon diagnostic ; or celui que vous avez posé est plutôt conservateur. Selon nous, en effet, la crise que traverse EDF n'est pas une crise conjoncturelle mais bien une crise structurelle, semblable à celle qu'a traversée Kodak, incapable de s'adapter aux évolutions technologiques qu'a connues son secteur.
Vous n'avez pas mentionné l'incertitude que fait peser sur EDF la décision que prendra l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) à propos de l'extension du fonctionnement des centrales au-delà des quarante ans, perspective qui s'approche à grande vitesse : notre parc a déjà une trentaine d'années …
Le mythe du nucléaire bon marché est aujourd'hui totalement dépassé. Alors que le coût des énergies renouvelables baisse de façon spectaculaire, les études de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) ou de l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) font apparaître que ce sont des EnR que viendra désormais la compétitivité énergétique. Il suffit pour s'en convaincre de constater qu'aujourd'hui, en France, le secteur nucléaire supprime des emplois quand l'éolien en crée massivement. Ne faudrait-il donc pas se poser la question des surcapacités nucléaires d'EDF et envisager un accord avec nos voisins allemands pour qu'ils ferment leurs vieilles centrales à charbon et que nous fermions nos vieilles centrales nucléaires ? Cela aurait en outre le mérite d'améliorer nos bilans écologiques.
Il faut réorienter les financements dans le sens de la transition énergétique. Compte tenu du coût astronomique du grand carénage que la Cour des comptes estime à 100 milliards d'euros, doit-on réellement prolonger la durée de vie de tous les réacteurs ? Les contribuables français doivent-ils financer un projet nucléaire pharaonique en Grande-Bretagne plutôt que de financer les EnR qui, à la différence d'un réacteur équipé d'une cuve fabriquée au Japon, pourront contribuer à notre souveraineté énergétique ?