Intervention de Jean-Frédéric Poisson

Séance en hémicycle du 29 janvier 2013 à 15h00
Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe — Mot ion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Frédéric Poisson :

D'ailleurs, même les représentants les plus éminents des éthiques de la discussion ont fait de cette perpétuation un impératif. Le philosophe allemand Hans Jonas, critique des éthiques tant du bien que des devoirs, formulait ainsi un nouvel impératif catégorique : « Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d'une vie authentiquement humaine sur terre » ; ou encore : « Agis de façon que les effets de ton action ne soient pas destructeurs pour la possibilité d'une telle vie. »

L'union d'un homme et d'une femme est la seule condition à la fois nécessaire et suffisante pour y parvenir. La pérennité de la société requiert que l'on assure tout ensemble le renouvellement des générations, ainsi que la transmission de tous les patrimoines, matériels ou spirituels, vers les descendants. Le mariage répond à l'évidence à ces nécessités. C'est aussi la raison pour laquelle la présomption de paternité a accompagné un peu plus tard la filiation en tant que telle.

Cette manière de considérer l'union de l'homme et la femme dans le mariage a traversé les siècles et elle a montré par son efficacité qu'elle méritait d'être appelée une institution. Les générations successives ont appris à lui faire suffisamment confiance pour continuer d'en faire le lieu d'une alliance privée et d'un engagement public. C'est le premier caractère de « l'utilité commune » du mariage en tant qu'il est fondé sur l'altérité sexuelle.

Le deuxième caractère d'utilité commune de ce même mariage est lié à la construction progressive et à l'éducation des enfants. Monsieur le rapporteur, vous avez accueilli pendant votre audition une table ronde de psychiatres et de psychanalystes. Cette audition s'est déroulée le 15 novembre 2012. Et lorsque vous évoquez dans votre texte, à la page 59, le développement des enfants élevés dans une famille monoparentale, vous récidivez – si je peux me permettre d'employer ce terme. À nouveau, seuls les points de vue qui concordent avec la thèse que vous défendez figurent dans votre analyse, et vous concluez, page 60, que les seules fragilités présentes chez les enfants élevés dans les couples de même sexe relèvent du regard social porté sur eux. Vous ignorez ainsi les mises en garde du docteur Lévy-Soussan à propos de toutes ces études qualifiées de convergentes, en dépit même des limites de méthode dont vous signalez l'existence pour en ignorer aussi vite la portée.

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