Ainsi totalement dissociée des capacités biologiques des personnes, votre conception de la filiation instaure de manière définitive un droit à l'enfant, dont nos codes avaient jusqu'ici réussi à se préserver. J'ai du mal à considérer qu'une telle distance à l'égard de la nature – doublée d'une telle volonté de satisfaire toutes les aspirations individuelles – constitue réellement un progrès social.
En ce sens, madame la garde des sceaux, nous sommes bien dans un changement de civilisation ou dans une « révolution anthropologique », pour reprendre l'expression de notre rapporteur, même s'il la conteste par ailleurs.
D'abord, parce que nous voyons bien que des bouleversements de ces notions d'égalité et d'utilité commune ne comportent pas que des conséquences purement juridiques. Mais surtout, parce que nous franchissons une limite supplémentaire dans le rapport que nous avons organisé jusqu'à présent entre la loi et la nature. À ceux de mes collègues qui se demandaient l'autre jour ce que peut bien être le « droit naturel », je les invite à relire l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme :…