Intervention de Colette Lewiner

Réunion du 24 janvier 2013 à 10h30
Mission d'information sur les coûts de production en france

Colette Lewiner, conseillère énergie du président de Capgemini :

Les technologies alternatives d'extraction du gaz de schiste ne sont pas aussi éprouvées que la fracturation hydraulique. Et il faut arriver de toute façon à fracturer la roche. On parle d'utiliser du propane ou du CO2 à la place de l'eau, mais ces technologies n'ont pas du tout le niveau de maturité du procédé actuel, qu'il aura fallu trente ans pour mettre au point. Je me demande s'il ne vaut pas mieux chercher à améliorer la technologie existante.

L'explication du refus de la France face à la fracturation est complexe. Outre l'opposition de José Bové, un film a répandu des informations totalement erronées. Et, lors de la dernière période électorale, le gouvernement précédent a cherché à apaiser le débat en retirant les permis d'exploration qui avaient été accordés dans un premier temps.

Par ailleurs, on constate aux États-Unis que le bas coût du gaz de schiste ralentit le développement des nouveaux réacteurs nucléaires. Peut-être l'industrie nucléaire française cherche-t-elle à se protéger à cet égard. Il est également possible que l'on cherche à préserver les accords entre GDF-Suez et les Russes – la communication de Gazprom contre les gaz de schiste est à cet égard caricaturale!

Au total, un ensemble de circonstances a fait qu'il n'y a pas eu assez de communication et de mobilisation pour influencer la décision du gouvernement C'est une bonne chose que le sujet revienne en débat.

Quant à la production nucléaire, on peut peut-être souhaiter une sûreté renforcée mais , elle est indéniablement fiable. Contrairement à celui de Tchernobyl, l'accident de Fukushima s'est produit dans un pays de haute technologie. Il a été provoqué par la conjonction de deux événements de force exceptionnelle : le tremblement de terre et le tsunami. Le tremblement de terre seul n'aurait pas pu avoir de telles conséquences. De plus, les Japonais utilisent une technologie de réacteurs nucléaires à eau bouillante – la technologie française, elle, est à eau pressurisée – et les réacteurs de Fukushima avaient une enceinte de confinement de moins que les réacteurs français..

Il n'y aurait pas eu de conséquences significatives du tremblement de terre et du tsunami si l'on avait pu refroidir les réacteurs qui s'étaient bien arrêtés et notamment si les pompes de secours avaient été placées en hauteur. En l'occurrence, elles étaient placées assez bas et la vague du tsunami les a inondées. Un des retours d'expérience en France sera que l'on imposera la constitution de réserves d'eau sur tous les sites nucléaires.

L'accident de Fukushima est analogue à celui de la centrale de Three Mile Island en 1979 aux États-Unis, dont on avait tiré les enseignements en aménageant les réacteurs. Si les Japonais avaient eux aussi procédé à ces aménagements, on aurait évité les explosions qui se sont produites par recombinaison entre l'hydrogène formé dans le bâtiment réacteur et l'oxygène de l'air, après que l'on eut tenté d'éventer l'enceinte soumise à une pression dangereuse. Les réacteurs français sont pour leur part dotés de recombineurs : en cas de création d'hydrogène sous l'effet de la chaleur, des catalyseurs permettent à cet hydrogène de se recombiner à l'intérieur du réacteur. À Fukushima, les explosions ont endommagé les bâtiments et accentué le rejet de radioactivité dans l'atmosphère.

Je ne partage pas la sévérité des reproches adressés aux exploitants. Ces personnes avaient subi un très fort traumatisme et ne savaient pas par exemple ce qu'étaient devenues leurs familles.

Pour tenir compte du retour d'expérience, nous renforcerons certaines parties des réacteurs et nous modifierons les modes opératoires.

Comme je l'ai indiqué, madame Chapdelaine, le coût de l'énergie a un impact significatif sur certains secteurs industriels : métallurgie, aluminium, chimie, engrais, etc. Mais tout le monde est concerné par les prix de l'électricité et du gaz. On a parlé de pouvoir d'achat « rendu » aux citoyens lorsque Free est entré sur le marché de la téléphonie mobile. Une électricité compétitive a également des effets positifs sur le pouvoir d'achat des Français.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion