La constitution de forces conjointes entre officiers de police judiciaire de la gendarmerie et militaires m'inspire plusieurs réserves. À mes yeux, travailler en missions, c'est le rôle des forces de sécurité intérieure, pas celui des armées : ce n'est pas leur métier, et elles ne sont pas formées aux opérations de sécurité intérieure. La porosité entre la délinquance et le terrorisme va d'ailleurs dans le même sens. Le déploiement de soldats, en tenue de camouflage, est nettement plus anxiogène que celui de gendarmes. Nous sommes une démocratie, dans laquelle c'est aux forces de sécurité intérieure d'assurer la protection du territoire. Reste à leur en donner les moyens, à les entraîner de façon adaptée à leurs missions.
Si l'on pousse plus loin la réflexion, on doit constater que l'État doit impérativement renforcer ses compétences régaliennes. Or, malgré les progrès faits dans la décentralisation, l'État, aujourd'hui, disperse encore ses interventions et, du fait de cette dispersion, prive la police, la justice et la gendarmerie des moyens dont elles ont besoin. C'est une petite révolution intérieure qu'il reste à opérer. Quand on pense que, toutes choses égales par ailleurs, la justice n'a pas davantage de moyens toutes choses égales par ailleurs qu'en 1914, on comprend que l'État ne peut pas tout faire. On a parfois l'impression que l'on vit dans le mythe de la bataille d'Alger : ce n'est pas de nature à sécuriser la population française.
En revanche, renforcer les contrôles aléatoires, comme le ministre de l'Intérieur l'évoquait ce matin, est une chose essentielle que le renforcement des effectifs des forces de sécurité intérieure a permise.