Chacun sait que la refondation de l'école passe par une réflexion profonde et continue sur la manière d'enseigner. La vie change, les enfants changent, les manières d'enseigner doivent évoluer. On demande beaucoup à notre école et aux enseignants, or notre système éducatif ne leur a pas donné suffisamment d'outils, même si la loi pour la refondation de l'école a mis en place la formation initiale et continue.
Monsieur Merriaux, au nom du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste, je suis heureux de pouvoir vous interroger, tant votre mission est importante. Mais votre mission est également complexe, d'où notre difficulté à appréhender vos objectifs.
Vous devez aider les enseignants dans leur pratique quotidienne en classe, en développant des outils pédagogiques, en permettant l'innovation pédagogique, la mise en lien des différentes expériences. Ce rôle devait être celui du CNDP, dont vous étiez l'un des dirigeants il y a encore quelques années. La Cour des comptes a rendu en 2014 un rapport au vitriol sur le CNDP, qu'elle a qualifié de « modèle obsolète » nécessitant « une réforme indispensable ». La haute juridiction indiquait en effet que l'opérateur ne remplissait pas ses missions puisqu'à peine 10 % des enseignants connaissaient le CNDP et ses publications, malgré un budget annuel de 136 millions d'euros. Elle ajoutait qu'à défaut de repenser les missions du réseau, la question de sa suppression pouvait être d'actualité. Pour l'équipe du CNDP de l'époque, pour le ministère, ce rapport appelait donc à une mutation de cet outil, qui demeure évidemment indispensable.
Avec la réforme engagée, vous prenez le bon chemin. Néanmoins, monsieur le directeur général, deux ans, c'est long. Savez-vous si les enseignants connaissent mieux Canopé qu'ils ne connaissaient le CNDP ? Avez-vous des chiffres en la matière ? Les enseignants consultent-ils régulièrement la plateforme Canopé, au demeurant très bien construite ? Achètent-ils plus souvent les outils que vous éditez ? Utilisent-ils vos outils gratuits ? Bref, avez-vous, en deux ans, corrigé les défauts qui suscitaient de vives critiques de la part de nombreux députés à l'époque sur la base du rapport de la Cour des comptes ?
En matière de formation, qu'apportez-vous de plus aux enseignants ? Quel est votre rôle par rapport aux ESPE ? Le réseau est-il sollicité par les différentes directions ?
En matière de numérique, le CNDP était très en retard – à peine 6 % des publications étaient réalisées via le numérique. Aujourd'hui, c'est votre objectif principal. Constatez-vous un grand nombre de téléchargements sur votre plateforme ? J'aimerais également connaître votre relation au numérique. Un grand nombre de collectivités territoriales équipent les écoles, les collèges et les lycées, mais beaucoup d'enseignants ont du mal à utiliser les méthodes pédagogiques liées au numérique. À cet égard, tous les potentiels du numérique sont-ils utilisés ? Jouez-vous un rôle au travers des documents que vous éditez ? En effet, l'école du numérique ne consiste pas simplement à placer des écrans dans les salles de classe.
J'aimerais aussi vous entendre sur la place de Canopé dans l'organigramme global du ministère. Comment travaillez-vous avec le ministère ? Quelles sont vos relations avec les différentes directions – la direction du numérique pour l'éducation (DNE), la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO), qui produit aussi des contenus éducatifs et pédagogiques –, mais aussi avec le Centre national d'enseignement à distance (CNED) ? Rien ne serait pire que de créer de nouveaux doublons : il faut à tout prix une clarté dans les prises de décision. Les membres du comité de suivi de la loi sur la refondation de l'école de la République constatent l'existence d'un problème de gouvernance au sein du ministère. Le réseau Canopé rajoute-t-il de la difficulté ou permet-il une simplification des missions ?
Votre budget est équivalent à celui de 2014. Or il fallait réaliser des économies, vous avez été mandaté aussi pour cela. Pouvez-vous nous apporter des éclaircissements sur ce sujet ?
Enfin, concernant l'innovation pédagogique, votre plateforme Viaéduc est fondamentale, en permettant aux enseignants de partager des ressources pédagogiques et d'échanger leurs expériences, de travailler et de produire des ressources ensemble, de créer leur propre blog, etc. Je rejoins la question de M. Reiss : pourquoi Amazon ? Sur le principe, je pense que c'est très bien, car il faut casser le monopole des éditeurs de création de contenus, car il génère des lourdeurs qui sont autant de freins à l'innovation. Certaines « chasses gardées » doivent s'ouvrir, il faut faire confiance aux personnes qui sont au coeur du métier.