Intervention de Sergio Coronado

Séance en hémicycle du 29 janvier 2013 à 22h00
Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSergio Coronado :

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, c'est après un très long débat en commission des lois, plus de vingt-quatre heures, après de nombreuses et, pour certaines, passionnantes, auditions organisées sous la conduite de M. le rapporteur pendant plus de deux mois, que nous arrivons, enfin, allais-je dire, à l'examen en séance publique du projet de loi qui ouvre le mariage civil et l'adoption aux couples de même sexe.

C'est dans un contexte de vif débat dans la société que la représentation nationale doit désormais se prononcer. C'est avec une fierté assumée que je prends donc la parole au nom du groupe écologiste. Il s'agit en effet de mettre fin à la principale discrimination dont sont encore victimes les citoyens du seul fait de leur orientation sexuelle.

Ce projet de loi fait ainsi entrer dans le droit commun une population discriminée en raison de sa sexualité. Des femmes, des hommes, des couples, des familles qui, depuis des mois, sont confrontées à la violence des mots, vont enfin bénéficier de la protection de cette institution républicaine qu'est le mariage civil.

La Cour de cassation, le 13 mars 2007, et le Conseil constitutionnel, à deux reprises, les 6 octobre 2010 et 28 janvier 2011, ont affirmé clairement que la responsabilité de modifier la loi incombait au législateur.

C'est donc ce que propose de faire le projet de loi présenté en conseil des ministres le 7 novembre dernier. Avec le vote de ce texte, que le groupe écologiste soutient et souhaite enrichir et compléter, le Parlement va rendre effectif le principe d'égalité devant la loi et tenir cette belle promesse que la République fait à chaque citoyen. À situation de fait similaire, traitement juridique similaire, voilà tout simplement ce qu'apporte le projet de loi. Il permet enfin de traiter de la même manière sur le plan juridique tous les couples, indépendamment de leur orientation sexuelle, c'est-à-dire de leur permettre d'avoir la liberté de choix entre les mêmes statuts conjugaux : le mariage, le PACS et le concubinage.

C'est le mariage civil que nous proposons d'ouvrir, celui-là même que la Révolution a arraché à l'Église pour en faire un cadre juridique, fondé sur le consentement mutuel, et sanctionné par l'autorité publique.

Ce cadre juridique qu'est l'institution matrimoniale n'a cessé d'évoluer depuis son instauration par la Constitution de 1791. Le code civil reflète les révolutions qui ont balayé le champ social : c'est en ces termes qu'un quotidien du soir saluait le bicentenaire du code civil, en 2004.

Le code de 1804, et nous le verrons peut-être au cours de nos débats, mérite un hommage sans doute un peu plus nuancé. Il offrait certes bien des contraintes, mais il portait aussi cette incroyable force de placer les volontés humaines au-dessus des faits naturels et des valeurs religieuses, et les articles sur le mariage et la famille en sont en partie l'illustration. Les codificateurs de 1804 avaient dans le fond une conception très politique des institutions. Avec elles, les citoyens bâtissent l'univers normatif dans lequel ils souhaitent vivre. Aux principes supérieurs du droit canon et de la loi naturelle, ils opposèrent la volonté souveraine des citoyens.

Le mariage civil d'aujourd'hui est radicalement différent de celui instauré il y a plus de deux siècles, et c'est parce qu'il a évolué qu'il est d'ailleurs devenu une revendication d'égalité.

C'est la Constitution de 1791 qui met en place la séparation du mariage civil et du mariage religieux. Le code civil la consacre en 1804. Il faut attendre 1884 pour voir le divorce pour faute réintroduit dans le texte. Les évolutions n'ont pas manqué tout au long de notre histoire, les transformations s'accélérant à partir des années 70. Il y a eu la loi de 1972. Le divorce par consentement mutuel a été introduit en 1975. Entre 1978 et 1993, plusieurs lois aboutissent à l'instauration d'une égalité des droits et des devoirs entre époux et vis-à-vis des enfants. En 2005, la loi supprime toute différence juridique dans les modes d'établissement des filiations.

Le cadre juridique que nous ouvrons aux couples de même sexe a connu les évolutions de toute institution. Ce cadre est à l'origine de la famille, il consacre socialement l'union de deux personnes ayant comme but la solidarité réciproque sur la base de l'affection mutuelle.

Constitution, Déclaration universelle des droits de l'homme et Convention européenne font du mariage une liberté fondamentale particulièrement partagée et protégée. Le refus d'accès au mariage pour les couples de même sexe se fonde sur une idée du mariage qui tient davantage du sacrement que du contrat civil.

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